Des partons de presse expriment leur désaccord avec le mode de répartition de la subvention de l’Etat à la presse privée

Au titre de la subvention de l’Etat 2016, 400 millions de nos francs ont été aloués à la subvention à la presse privée du burkinabè. En tout, une vingtaine de journaux, une cinquantaine d’entreprises de presse audiovisuelle, de la presse en ligne et celle en langues nationales ont bénéficié d’une enveloppe. Mais si certains se tournent les pouces pour cette manne venue du contribuable, d’autres le sont moins ou pas du tout. Nous sommes de ceux qui rejettent, avec la dernière énergie, le mode de répartition de ce bien public qui reste inique et injuste. Pour nous en effet, la clé de répartition de ladite subvention est arbitraire à tout point de vue, et pour ce faire doit être revue d’ici à la prochaine subvention et nous sommes d’autant plus fondés à le clamer que cette subvention provient du Trésor public et vise à soutenir les entreprises de presse dans leur existence.
Nous nous souvenons qu’auparavant, aucun rapport justificatif de gestion n’était élaboré à l’issue des travaux de cette commission d’attribution et rendu public. C’était le clair-obscur, et les médias s’y sont accommodés sans comprendre comment et pourquoi l’argent public était ainsi distribué malgré les écarts constatés. Mais pour la présente, les commissaires ont décidé de faire dans la transparence. Ce qui nous permet sur des bases objectives de critiquer la façon dont les choses sont faites. Car, lorsqu’on opte pour la clarté, la lumière, on va jusqu’au bout de sa logique, de manière désintéressée.
Ceci dit, par souci de clarté, nous prendrons les manquements de cette commission, un à un, pour mieux justifier notre désapprobation.
1 – De l’arbitraire de la procédure de répartition
Pour la répartition, les vingt journaux relevant de la presse écrite sont logés à la même enseigne avec la même clé de répartition de la subvention. Ainsi, que vous soyez quotidien, mensuel, hebdomadaire, bimestriel ou périodique, vous vous retrouvez sur mêmes règles de partage alors que le coût de production et le rendement sont loin d’être les mêmes selon que l’on est un quotidien ou un périodique c’est-à-dire hebdomadaire, bimensuel, mensuel etc. Un quotidien, c’est au moins 200 numéros par an ; un hebdomadaire, 52, un mensuel 12 et un bimestriel, 6. Comment peut-on aligner quotidiens et périodiques sur les mêmes réalités économiques ? C’est aussi pareille, contrairement à ce qu’a fait la Commission, en alignant les Télés et les radios FM au nom de leur appartenance à la presse audiovisuelle alors que les charges d’une télé sont le double voire le triple de celles d’une radio FM.
Et en fin de compte, le comble c’est que tous les organes de presse qu’il s’agissent de l’audiovisuelle ou de la presse écrite, tous sont considérés sur les mêmes critères de calcul et d’octroie de la subvention. L’on ignore totalement les différences notoires en termes de coûts de production et de rendements qui les séparent comme le jour et la nuit. Dans notre environnement burkinabé, un quotidien ou une télévision pour fonctionner c’est au minimum une quinzaine d’employés à salariser sans compter la production quotidienne. Cette uniformisation mise en oeuvre par la commission au nom d’une certaine égalité de droits est tout simplement un arbitraire.
2- De l’obligation d’être à jour vis-à-vis des impôts et de la CNSS
Ici encore, l’injustice est flagrante entre un organe à jour et un autre non à jour des ses obligations fiscales ou des cotisations sociales. Si pour les impôts, l’on convient qu’il faut s’acquitter des taxes perçues à l’Etat et que chaque organe doit selon ses prestations, concernant les cotisations sociales, il n’est pas compréhensible qu’un organe de presse qui emploie deux agents et les déclarent puisse bénéficier d’un montant unique pour tous selon une quote part fixée par la commission tandis qu’un autre organe qui déclare une vingtaine d’employés et qui se trouve être à jour pour une quinzaine d’employés soit tout simplement écarté et ne reçoive aucun montant. La conséquence d’une telle iniquité c’est qu’un bimensuel qui fait 24 parutions/l’an, 100. 000 F CFA de TVA reversés et avec deux agents déclarés et en règle vis-à-vis de la CNSS se retrouve au finish avec une part de la subvention quatre fois plus que ce que reçoit un quotidien qui doit se consoler avec une portion congrue alors que ce dernier fait plus de 200 parutions/l’an et emploie au minimum un dizaine de travailleurs.
Au sujet des pièces de la CNSS et des Impôts intégrées comme conditionnalités pour l’accès à la subvention dans la rubrique bonus donc pièces non obligatoires, il faut dire que ces bonus représente environ ⅔ de la part allouée à un organe de presse. Cela est une fâcheuse situation. Comment la part égalitaire que donne droit les pièces obligatoire peut-elle devenir moins importante que les bonus offerts sur la bases des pièces non obligatoires( CNSS et Impôts) ? La question fondamentale maintes fois posée mais jamais résolue, sinon résolue de façon unilatérale et abusive, a été toujours de savoir s’il revenait à la commission de faire le gendarme à la place des services d’impôts et de la CNSS. Surtout qu’elle ne peut pas faire de retenues à la source pour ensuite les reverser auxdits services. A quoi ça sert alors cette sanction inutile si ce n’est déshabiller Pierre pour habiller Paul. En termes plus clairs, c’est récupérer à d’autres organes ce qu’ils devaient avoir notamment ceux-là qui sont dans le besoin pour redistribuer à d’autres ?

3/ Les 40 millions à la formation.
Dans cette subvention de 400 millions FCFA, un dixième, soit quarante millions, a été réservé à la formation. Personne ne doute encore du bien-fondé de la formation pour une entreprise de presse, ou tout évolue et où il faut être constamment au diapason. A ce titre, prévoir un fonds pour la formation, est à féliciter. Mais, depuis déjà une dizaine d’années, voire plus, le CNP/NZ fait de la formation des journalistes et des acteurs du monde de la presse son cheval de bataille, et il le fait jusqu’ à présent à perfection. Alors, pourquoi vouloir en rajouter, si notre devancier le fait déjà bien, si tant est qu’on est animé de bonnes intentions ?
Pour nous, faire la même chose que le CNP/NZ, c’est manquer d’esprit d’initiative. A la rigueur, si lesdites formations étaient spécifiées et totalement différentes de celles du CNP/NZ, on aurait applaudi à tout rompre. Mais parler de 40 millions à la formation, reste vaseux et ouvre la voie à toutes les dérives au niveau de la gestion de ce fonds public.
4/ Des 3,6 millions FCFA prélevés pour le “fonctionnement” de la commission
Il apparaît aussi nécessaire de procéder à la dénonciation de certaines pratiques de la commission qui paraissent injustifiables. Nous dénonçons donc avec la dernière vigueur, la retenue de 3,6 millions comme dotation de la commission pour dit-on son fonctionnement. Pour nous, parler de frais de fonctionnement c’est faire du maquillage lorsqu’il s’agit purement et simplement de perdiems que se sont généreusement octroyés les membres de la commission.
A notre entendement, s’octroyer 1/100 ème de la l’enveloppe de la subvention en guise de perdiems, montant qui représente la part d’au moins 03 organes de presse n’ayant pas pu avoir accès au bonus, cela est gabegique. Il aurait fallu que le mandat de membre de la Commission fût gratuit pour éviter que les chasseurs de perdiems de tout poil n’y trouvent aucun objet d’intérêt. En effet, nous nul ne prêche la proscription de toute commodité dans le cadre du travail. Mais, la bonne gouvernance commande de faire les choses dans des proportions acceptables.
C’est pour toutes ces raisons que nous dénonçons, avec véhémence, cette attribution que jugeons inique et totalement contraire à la philosophie qui sous-tend la subvention de l’Etat. En tout état de cause, d’une part, nous exigeons une remise à plat des textes qui encadrent la subvention avant la prochaine session et d’autre part, leur redéfinition concertée et consensuelle aux fins d’avoir des règles qui permettent une meilleure prise en compte des intérêts des uns et des autres dans l’équité, la justice et sans exclusion.

Boureima Diallo( Notre Temps), Souleymane Traoré ( Le quotidien), Cyr Payim Ouédraogo( Sciences infos et culture) Zerbo (Libérateur).