Depuis le début de la belle aventure des Etalons à la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2017), les hommes politiques ne ratent aucune occasion pour adresser des félicitations et encouragement aux Etalons à chacune de leur sortie. Une attention pour la compétition pas toujours totalement désintéressée

Le sport en général et le football en particulier, hissé au rang de sport roi, a cette capacité de fédérer les énergies, ne serait-ce que temporairement, rapprocher les contraires, et dans nos nations en construction, à servir de ciment d’unité nationale. Pendant les grandes compétitions sportives opposant les pays, il y a comme une sorte de gentlemen agreement entre acteurs socio-politiques pour taire ce qui fâche, et se mettre tous derrière la sélection nationale. C’est l’opium du peuple, comme dirait l’autre ! On l’observe bien depuis le début de la Coupe d’Afrique des nations qui se déroule au Gabon. Bien sûr, on continue d’interpeler le gouvernement afin qu’il prenne des mesures urgentes et appropriées pour faire face aux menaces terroristes, notamment dans le nord où des enseignants sont menacés par des terroristes dans l’exercice de leur métier. Mais il serait malséant d’enclencher un mouvement de grève au moment où l’équipe nationale défend nos couleurs hors des frontières. Non seulement, une pause s’impose, mais les professionnels de la politique se sentent obligés d’exprimer leur entier soutien aux joueurs qui composent la sélection nationale. S’instaure alors une compétition dans la compétition pour saluer la belle prestation de l’équipe nationale, dans le secret espoir d’attirer sur soi la sympathie du public sportif, voire plus. « Comme tous les Burkinabè, c’est avec un grand bonheur que la direction politique, les militants et les sympathisants de l’UPC suivent les exploits réalisés par les Etalons au Gabon, qui se sont déjà qualifiés pour les demi-finales dans le cadre de la 31ème édition de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). L’UPC salue ce travail formidable de notre équipe nationale qui fait briller le drapeau du Burkina Faso », écrit le président de l’Union pour le progrès et le changement (UPC), Zéphirin Diabré, par ailleurs chef de file de l’opposition, au lendemain de la victoire des Etalons face aux Aigles de Carthage. Quant au président du Faso, Roch Marc Kaboré, il n’a pas hésité à téléphoner directement aux joueurs pour leur adresser ses vives félicitations. Sur une vidéo publiée par le chargé de communication de la Fédération burkinabè de football, on voit les joueurs, tout sourire en train converser avec le président et se passer à tour de rôle l’appareil. D’habitude réservé, on a vu le premier ministre Paul Kaba Thiéba tout heureux, exprimant sa joie bras levés et tombant dans les bras d’un co-supporter dès le coup de sifflet final du match.

Sur compte Twitter, l’ex candidat indépendant à la dernière élection présidentielle, Jean Baptiste Natama a adressé ses vives félicitations et encouragements au « Onze national ». Cité dans de nombreuses scabreuses affaires, il a fallu la victoire des Etalons contre les Aigles de Carthage pour que l’ancien premier ministre Yacouba Isaac Zida sorte de son silence dans lequel il s’est emmuré depuis des mois. Celui dont le retour sur la cène politique pour certains ne fait l’ombre d’aucun doute, s’est fendu d’une déclaration dans laquelle l’on ne sait s’il parlait seulement des Etalons ou de lui-même : « Je ne cesserai de le répéter que quand nous croyons à ce que nous faisons, dans la vérité et l’humilité, nous sortons toujours victorieux… », a t-il écrit sur sa page Facebook.
De passage à Paris, le président de l’Assemblée nationale, Salifou Diallo a assisté, écharpe aux couleurs des Etalons autour du coup, au match Burkina-Tunisie dans la salle des fêtes de l’ambassade du Burkina. Avant d’envoyer envoyer un message d’encouragement aux joueurs, qui a été lu par le chargé de la communication de la Fédération burkinabè de football (FBF).
A peine le match terminé hier soir entre le Burkina Faso et l’Egypte, que les réactions ont commencé à fuser à nouveau venant du monde politique. C’est à qui sera le premier à se prononcer. Alors qu’il reste un match à jouer pour la 3ème place, le chef de file de l’opposition demande aux Burkinabè de « réserver un accueil triomphal et chaleureux à ces dignes fils de la nation à leur descente à l’aéroport ». A t-il oublié que nos représentants avaient atteint la finale qu’ils avaient perdue sur un score étriqué d’un but à zéro face au Nigeria en 2013 en Afrique du Sud ?

Cette fois-ci, le président du Faso, s’est contenté d’un message lu pour les joueurs et publié sur sa page Facebook, comme l’ont fait aussi des membres du gouvernement dont le ministre de la Communication et porte-parole, Remis Fulgance Dandjinou. Jean Baptiste Natama, Gilbert Noël Ouédraogo, Yacouba Isaac Zida et bien d’autres hommes politiques se sont senti le devoir patriotique d’adresser des mots de consolation à leurs compatriotes qui venaient d’être privés de finale. Qui sait, rien que pour ça, des électeurs pourraient s’en souvenir un jour au moment de glisser leur bulletin dans l’urne. Mais ce qui est certain, c’est qu’une victoire est toujours profitable à l’image d’un pays et son gouvernement aussi bien au plan intérieur qu’au plan extérieur.
Avec la CAN, il y a un regain de patriotisme avec les drapeaux qui ornent les domiciles, commerces et tous moyens de transports. Il faut montrer un pays l’image d’un pays uni et solidaire de son équipe nationale, en attendant la fin de la compétition le 5 février pour retourner à nos affaires domestiques.

Hermann Wendkouni Nazé et Salam Sondé
Kaceto.net