Fidèle à sa réputation, le ministre d’Etat, ministre de la Sécurité, Simon Compaoré est arrivé à 9 heures pile hier matin dans la salle de conférence de la mairie centrale de Ouagadougou où l’attendaient des dizaines de journalistes, venus l’écouter faire le point sur la situation sécuritaire, dominée depuis quelques mois par des attaques et destructions de biens sur l’ensemble du territoire

Deux jours après la neutralisation d’Harouna Dicko par les forces anti-terroristes le 22 mars à Petega, à 25 km de Djibo, dans le nord du Burkina, puis l’arrestation de près d’une vingtaine de ses compagnons de terreur, c’est un ministre de la Sécurité qui s’est présenté hier matin devant un parterre de journalistes, l’air serein et déterminé, pour faire le point de la situation sécuritaire qui prévaut dans notre pays, et réaffirmer la détermination du gouvernement à assurer la sécurité des Burkinabè et des étrangers vivant dans notre pays.
Faisant le bilan des attaques terroristes apparues au Burkina entre 2015 et 2016, le ministre Simon Compaoré a révélé qu’une vingtaine en avait été enregistrées et se sont soldées par la mort de 70 personnes. Phénomène récent au Burkina comparativement aux voisins malien et nigérien, la première attaque est intervenue le 4 avril 2015 contre une patrouille de gendarmerie et l’enlèvement d’un Roumain à Tambao. Depuis lors, l’actualité nationale est régulièrement marquée par des assassinats ciblés, enlèvements d’Occidentaux suivis de demande de rançon, embuscades, usage d’engins explosifs, etc. Le but premier recherché par les terroristes islamistes étant de semer la terreur, occuper une partie du pays pour y installer des Katibas et mener le djihad contre « les mécréants », c’est-à-dire, ceux qui ne pensent pas comme eux.
Il faut dire que le chaos qui s’est installé en Libye suite à la chute et l’assassinat de Mouhammar Kadhafi en 2011 a créé les conditions d’une déflagration sur l’ensemble des pays du Sahel. Une bonne partie de l’arsenal militaire de l’ancien régime libyen est tombée dans les mains de groupes armés et autres bandits qui ont déferlé par la suite sur le Mali, le Niger, la Mauritanie, se livrant à des trafics en tout genre (cigarettes, armes drogues) et semant la violence contre les populations civiles. Des Burkinabè qui étaient partis faire le Djihad au Mali sont rentrés, animés de la volonté de faire du mal aux Occidentaux et punir les croisés. Malheureusement, la pauvreté extrême qui frappe des millions de jeunes et l’absence d’avenir pour eux a créé les conditions favorables à l’expansion de leur idéologie nihiliste. A ces facteurs s’ajoute, selon le ministre Simon Compaoré « le lourd héritage de l’ancien régime qui avait pactisé avec certains groupes à travers des compromissions ou des compromis pour être à l’abri (trafics illégaux, traitement de rançons des prises d’otages, bases arrières pour certains groupes armés ».
On a ainsi assisté à la naissance en cascade de groupes ou groupuscules terroristes, aux intérêts parfois divergents, mais tous animés d’une seule volonté de puissance : combattre les infidèles, instaurer la charia non par la persuasion, mais par la violence dans ses formes les plus cruelles. Al Qaida du Maghreb islamique, Al Mourabitoune, Ansar Eddine, Front de libération du Macina, Ansaroul islam de Malam Boureima Dicko, etc., des noms dont la seule évocation donne des frissons et qui évoque tout sauf la paix que recommandent toutes les religions et les spiritualités.
Face à cette menace islamiste, contre la volonté de puissance de ces groupes qui se sont auto-investis d’une mission de purification de la société, les Etats n’ont d’autres choix que d’opposer, par tous les moyens, une résistance, afin de garantir la quiétude à leurs peuples. Hier, le ministre Simon Compaoré a énuméré les actions menées par l’Etat burkinabè seul, à l’intérieur de ses frontières, et les opérations conjointement élaborées avec les pays de la sous-région ouest-africaine, mais aussi avec l’Union européenne, la France et les Etats-Unis. La police de proximité avec la mise en place des Comités locaux de sécurité sera bientôt mise en place « pour prendre en compte la problématique des groupes d’auto-défense », mais, précise le ministre, il n’est pas question d’intégrer les Kogwéogos dans les rangs des Forces de défense et de sécurité. « Si en tant que Burkinabè les Kogwéogos peuvent nous fournir des informations, ils sont les bienvenus », a déclaré Simon Compaoré. Des opérations spéciales et des investigations menées sur l’ensemble du territoire ont permis l’arrestation de 70 suspects impliqués dans des attaques terroristes et des procédures judiciaires sont engagées contre eux. Dans une guerre asymétrique, le renseignement qui occupe une place centrale face à l’adversaire par définition invisible, a été renforcée en moyens financiers et humains, en même temps que l’arsenal juridique est durci contre les faits de terrorisme.
Répondant aux questions des journalistes, le ministre a refusé de dévoiler la stratégie mise en place pour sécuriser les populations notamment dans le Nord, invitant l’opinion nationale et internationale à le juger aux résultats. Il n’est pas question non plus pour l’instant de décréter l’état d’urgence dans cette partie du pays, l’interdiction de circuler à deux roues entre 16h et 6h du matin décrétée par le gouvernement de la région étant la réponse appropriée au contexte actuel. On a appris qu’à la suite de l’attaque dont a été l’objet l’équipe de gendarmes mobile à Petega, le MDL chef Jean-Michel Ilboudo a été blessé, puis évacué et opéré à Ouaga et que ses jours ne sont pas en danger. Idem pour l’élément Assane Compaoré, atteint au visage par des éclats et également soigné dans la capitale. « pas un mètre carré ne sera cédé aux terroristes pour installer des katibas », a promis le ministre Compaoré. Il a aussi invité les populations à mieux collaborer avec les forces de défense et de sécurité, s’engageant à protéger les informateurs. Après concertations avec le ministère de la Sécurité, la direction de Coris Bank, qui avait fermé l’agence de Djibo le 21 mars, est revenue sur sa décision et rouvert ses portes dès hier matin, à la grande satisfaction du ministre Simon Compaoré, visiblement agacé d’avoir été mis sur le fait accompli.
Au cours de la conférence de presse, le chef d’Etat-major adjoint de la gendarmerie et commandant de la 3èmerégion, le Colonel Serge Alain Ouédraogo, a fait le point sur les investigations lancées depuis le début des attaques et résultats obtenus. Très fouillée, on a appris, entre autres, que c’est dans le pneu d’un véhicule semi-remorque que les armes qui ont servi à l’attentat de janvier 2016 ont été camouflées et transportées jusqu’à Ouaga. (lire en fin de texte, le point complet du Colonel Serge Alain Ouédraogo)

Joachim Vokouma
Kaceto.net

Attaques terroristes : point de situation en mars 2017 (Colonel Alain Serge Ouédraogo, chef d’Etat-major adjoint de la gendarmerie nationale)

Avec l’arrestation au Mali du terroriste Mimi Ould Baba Ould Cheik en janvier 2017, une mission de MATDSI a été envoyée à Bamako dans le cadre de la coopération policière et l’entraide judiciaire entre le Burkina et le Mali. La dite mission a pu recueillir non seulement les aveux du Sieur Mimi Ould Baba Ould Cheikh, commanditaire principal des attaques de Cappucino et de l’hôtel Splendid, mais aussi Ibrahim Ould Mohamed, le transporteur des armes et équipements qui ont servi à l’attaque.
En effet, les sieurs Mimi Ould Baba Cheikh et Ibrahim Ould Mohame, anciens pensionnaires du site de réfugiés de Mentao à Djibo, entendus par les enquêteurs burkinabè ont révélé leurs implication dans les attentats de janvier 2016 à Ouagadougou contre le restaurant Cappucino et le Splendid Hôtel.
Mimi Ould Baba affirme qu’il a été présenté au nord du mali au sieur Mohamed Ould Nouiny alias El Hassan, adjoint de Mocktar Belmocktar, responsable du groupe Al Mourabitoun, proche d’Aqmi pour un projet d’attaque sur Ouagadougou.
Suite à son adhésion pour le dit projet contre une promesse d’une prime de 10 millions de F CFA dont le paiement sera assuré par Abou Yahiya responsable d’Aqmi et Emir du Sahara, il s’est rendu quelques semaines avant l’attaque en compagnie d’un Arabe prénommé Abderrahamane avec des cartes d’identité nigérienne pour une mission de repérage de sites, potentiels cibles. Les sites repérés, visités, photographiés et filmés sont : le café-restaurant Capuccino, le restaurent « Le Verdoyant » et la devanture de Splendide Hôtel.
Du 20 au 25décembre 2015, Mimi et son compère Abderrahamane ont séjourné à l’auberge Assikpo dans la zone de Kwamé Nkrumah pour effectuer la mission de repérage Mimi Oul Baba s’est enregistré dans cette auberge avec une fausse identité (Omar A. Yanya) et y a occupé la chambre 17 en compagnie du nommé Abderrahamane.
De retour au Mali, les deux terroristes ont à nouveau rencontré Mohamed Ould Nouiny pour le compte rendu. Une fois le choix porté sur le café Cappucino, Mimi Ould Baba a été chargé de conduire la mission sur Ouagadougou. L’armement et le matériel de l’attaque ont été soigneusement dissimulé dans un pneu de camion semi-remorque que Mimi a fait convoyer au Burkina par les soins de son lieutenant Ibrahim Ould Mohamed, contre une promesse ferme de , million de F CFA
Ibrahim Ould Mohamed a pénétré le territoire burkinabè le janvier avec l’armement soigneusement camouflé dans le pneu évoqué plus haut
Venu de Boni au Mali à bord d’une Toyota Hilux double cabine, il a emprunté la compagnie de transport STAF à partir de la ville de Djibo. Une fois à Ouagadougou, Ibrahim Ould a été hébergé quelques jours au domicile de Maiga Alhousseini Bocar. Sur instruction de Mimi Ould Baba, Ibrahim Mohamed a contacté une jeune burkinabè du nom de Sawadogo Maliki pour louer une villa devant héberger le commando au complet.
Ignorant tout de leurs intentions le jeune Maliki après de qui Mimi Ould Baba achetait régulièrement du bazinet des boubous à chacun de ses passages à Ouagadougou, a fait les démarches auprès du sieur Tiemtoré Nayabtengadit Gourma, pour un contrat de bail.
Monsieur Tiemtoré qui est intermédiaire dans l’immobilier (démarcheur) a réponu aux sollicitations et proposé aux intéressés une mini-villa dans le quartier Senyiri, proche du SIAO. La villa été louée pour un séjour d’un mois pour un montant cumulé de 300 000 F CFA que les terroristes ont payé cash.
Mimi Ould Baba est entré dans le territoire burkinabè le 9 janvier 2016 avec les trois jeunes assaillants, à bord d’une berline noire de marque Hyundai immatriculée au Togo. Ils ont rallié la ville de Ouagadougou en passant par Djibo.
Du 9 au 16janvier 2016, Mimi Ould Baba, les trois jeunes assaillants, Abderrahamane et Ibrahim Ould Mohamed ont séjourné dans la mini-villa louée au quartier Senyiri.
Le 15 janvier, Ibrahim Ould Mohamed qui a dormi à la gare de STAF Ouaga a pris le premier départ matinal pour Djibo. A 19 heures précises, Mimi Ould Baba a déposé les trois jeunes assaillants derrières l’immeuble abritant le café Cappucino et s’en est allé directement pour Djibo.
Au moment où les coups de feu crépitaient, seuls les trois assaillants étaient encore dans la ville de Ouagadougou.
Le 15 janvier, peu après 23 heures, Ibrahim Ould Mohamed et Mimi Ould Baba après s’être retrouvé à Djibo, ont traversé ensemble la frontière burkinabè par un chemin défilé pour le Mali avec le véhicule de Mimi Ould Baba.
Il est clairement établi que les personnes suivantes sont responsables de l’attaque de Cappucino et de Splendid :
• le commanditaire : Mohamed Ould Nouiny alias El Hassan, Emir du groupe terroriste Al Mourabitoune, adjoint de Mocktar Belmocktar (activement recherché
• Le chef des opérations, Mimi Ould Baba Cheikh (arrêté au Mali en janvier 2017)
• Le transporteur de la logistique, Ibrahim Ould mohamed, arrêté au Mali en 2016 et impiqué dans l’attaque de Grand-Bassam
• Le superviseur de l’attaque, Abderrahamane, sans autre précision ; homme de confiance de Mohamed Ould Nouiny (activement recherché)
• Le parrain et financier de l’attaque, Yahiya Abou El Hammam, émir du Sahara, responsable d’Aqmi.
Les investigations menées par les enquêteurs de retour du Mali ont permis également :
1- L’interpellation de Sawadogo Maliki et de Tiemtoré Nayabtenga dit Gourma. Sawadogo Maliki est celui qui a aidé Ibrahim Ould Mohamed à louer la mini-villa au profit du commando. Tiemtoré Nayabtenga est l’intermédiaire en location immobilière qui a proposé la villa de monsieur Zougmoré Antoine Amado à Ibrahim Ould Mohamed, précurseur du groupe de terroristes
2- De retrouver à Ouagadougou l’auberge où les deux terroristes (Mimi et Abderrahamane) ont séjourné pendant leur mission de repérage de cibles
3- La localisation de la mini-villa ayant servi de base et de logement pour les terroristes depuis leur arrivée jusqu’à l’attaque de Cappucino et Splendid
4- La découverte du pneu de véhicule semi-remorque ayant servi de cache d’armes et de munitions utilisés pour l’attaque transporté depuis le Mali via Djibo
5- L’interpellation du Sieur Maiga Alhousseini Bocar dont le domicile a hébergé le terroriste Ibrahim Ould Mohamed à son arrivée à Ouagadougou le 5 janvier 2016 avec le pneu dissimulant l’armement pour l’attaque
Les investigations se poursuivent pour déterminer, identifier, localiser et appréhender toutes les personnes qui ont été d’un soutien quelconque aux terroristes. Cependant, il est à noter que pour ce genre d’action, les terroristes impliquent très peu de personnes surtout locales pour garantir le succès des opérations.

L’attaque de Samoroguan

En octbre 2015, la brigade de gendarmerie de Samoroguan a subi une attaque terroriste orchestrée par un groupe dirigé par Aboubacar Sawadogo, alias Boubacar Mossi, originaire de Kaya, ancien membre de la police islamique de Tombouctou. Il est responsable avec Keita Souleymane (arrêté au Mali) de la Katiba de Kaled ibn Walid ou Ansardine Sud, branche de Ansar de Lyad Ag Ghaly. Sa mission était d’implanter une katiba au Burkina pour y mener le djihad ; pour cela, il a choisi la zone de Orodara. Il a dirigé l’attaque contre la brigade avec 13 assaillants, soit 4 Maliens et 9 Burkinabè. 5 des assaillants (4 Burkinabè et un malien) ont été interpellés, notamment le chef du groupe et le logisticien fournisseur des armes et munitions. Un assaillant, en l’occurrence le fils de Aboubacar Sawadogo (le chef du groupe) a été tué au cours de l’attaque et lui-même a été blessé avant d’être arrêté au Mali, leur base de repli.
Plus d’une dizaine de complices de cette attaque ont été interpellés au Burkina. Deux Djihadistes ayant participé à la formation en maniement des armes avec le groupe ont été interpellés, ce sont les mêmes qui s’opposaient radicalement aux vaccinations dans la zone de Kénédougou. Un de leur guide spirituel a été interpellé ; il prêchait entre autres l’abandon de la carte d’identité et le refus de la soumission à l’Etat. Le chef religieux qui était leur logeur et beau-père d’un des djihadistes est également mort dans l’attaque contre la brigade (cependant, il semblait s’opposer à la violence et aux idéaux des terroristes)

Enlèvement du Roumain

Le 4 avril 2015, un groupe d’individus armés ont kidnappé dans la zone de Tambao Gherghut Lulian, d’origine roumaine. Aqmi a revendiqué l’enlèvement et a eu à donner des nouvelles du Roumain au travers d’une vidéo tournée en septembre 2016. Dans la vidéo, le Roumain a relaté être en bonne santé, pense à sa famille et demande à son gouvernement de tout faire pour le libérer.
Enlèvement du Dr Elliot
Aqmi a revendiqué l’enlèvement d’un couple d’australiens, Kenneth et Jocelyn Elliot le 15 janvier qui vivait dans la ville de Djibo depuis 1972 et y ont même implanté un hôpital pour soigner la population. L’épouse du Dr Ken Elliot a été libérée le 7 février 2016 par Ansar Dine de Lyag Ag Ghaly, un groupe allié d’Aqmi

Tentative de recrutement de djihadiste au Burkina

Un réseau de recrutement destiné à alimenter des filières terroristes dans la sous-région et au Burkina a été démantelé le 23octobre par les forces de sécurité. Un assaillant a été abattu ; un autre a été interpellé et un 3è est toujours recherché. Le fuyard est Abdoulaye Sawadogo alians Abdallah, petit frère de Aboubacar Sawadogo, le chef du groupe qui a attaqué la brigade de Samoroguan. Deux autres djihadistes radicaux interpellés depuis octobre 2015 ont été pris à Ouaga par les forces de sécurité pour avoir participé à des attaques terroristes au Mali, contre la Minusma, le contingent burkinabè et un des interpellés est présumé auteur de l’assassinat d’un casque bleu bengladesh à Bamako.

Kaceto.net