Le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples et la Fédération internationale des droits de l’homme ont transmis à l’Onu un rapport sur la situation de la femme Burkinabè. Accablant.

La semaine dernière, la situation des droits humains au Burkina a été examinée à Genève à l’occasion de la 117ème session du Comité des droits de l’homme de l’Onu. (Voir http://kaceto.net/spip.php?article190). A côté de la délégation officielle conduite par le ministre de la Justice, René Bagoro, des organisations de défense des droits de l’homme dont le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) avaient également fait le déplacement de Genève. Dans un rapport rédigé en mars 2016 à l’attention du Comité, le MBDHP et la FIDH y avaient consacré un chapitre sur la situation spécifique de la femme Burkinabè. Elle est loin d’être reluisante. « Malgré la ratification d’instruments internationaux et régionaux visant à protéger les droits des femmes, la situation des droits des femmes reste très préoccupante, sur le plan légal mais aussi dans la pratique. Nos organisations s’inquiètent de la persistance des conceptions et attitudes stéréotypées du rôle des femmes, de normes et pratiques discriminatoires et de violences qui empêchent les femmes de jouir pleinement de leurs droits », note le rapport qui fourmille d’exemples d’atteintes graves aux droits de la femme. Ainsi, selon l’article 238 du code des personnes et de la famille, l’âge légal du mariage est de 17 ans pour les femmes et de 20 ans pour les hommes. Une dispense d’âge peut toutefois être accordée par un tribunal civil pour motif grave à partir de 15 ans pour les femmes et de 18 ans pour les hommes. Quant à l’article 246, il stipule que la femme divorcée, veuve ou dont le mariage a été annulé, ne peut contracter un second mariage qu’après l’expiration d’un délai de 300 jours. L’homme n’est soumis à aucun délai !
En cas de désaccord du couple sur le lieu de résidence de la famille, le dernier mot revient au mari. Les deux ONG épinglent également les mariages précoces qui perdurent et qui concernent une fille sur deux de moins de 18 ans, un pourcentage qui peut culminer à 86 % dans la partie sahélienne du Burkina. Peu éduquées, elles tombent précocement en grossesse, les exposant à des risques (fistule obstétricale, voire la mort) ou à la mort du fœtus. Le manque d’information explique en partie la prévalence contraceptive très faible au Burkina, « entre 16 et 17 %, alors que les besoins insatisfaits en terme de contraception s’élèvent à 25 % ».
Le rapport du MBDHP pointe aussi du doigt le non respect de l’article 519 du Code des personnes et de la famille selon lequel, « lorsque l’un des époux décède, l’autorité parentale est dévolue de plein droit à l’autre ». De fait, les parents du mari décédé s’arrogent le droit d’administrer les biens des enfants mineurs, mais paradoxalement refusent de les prendre en charge.
Bien qu’interdites depuis 1996, les mutilations génitales féminines perdurent et frappent environ 76% des Burkinabè entre 15 et 49 ans, selon l’Unicef.
Dans le domaine foncier, « seules 20 % des terres burkinabè appartiennent à des femmes », alors que la loi accorde un accès égal aux terres que les hommes.
Interpellée, la délégation officielle s’est appliquée à donner des réponses aux préoccupations formulées par les défenseurs des droits de l’homme et reprises par le Comité des droits de l’homme. Sur l’âge du mariage par exemple, on a appris qu’il est question de revoir la loi pour faire coïncider l’âge du mariage à la majorité civile qui est de 18 ans. Au sujet de l’héritage, sujet sensible notamment dans les campagnes, la loi est pourtant claire : « c’est le conjoint survivant quel que soit son sexe, qui est l’héritier des biens de celui qui est décédé. Les femmes peuvent hériter de biens immobiliers, du moins sur le plan légal. Mais dans la réalité, compte tenu des mentalités, ce n’est pas nécessairement le cas », a concédé la délégation officielle.
Non respect du quota Genre de 30% aux élections, interdiction de l’avortement alors que dans le même temps, le Burkina soutient que les avortements illégaux sont la troisième cause de mortalité maternelle, persistance des mutilations génitales féminines, etc., assurément, de nombreux défis restent à relever pour créer les conditions de l’épanouissement de la femme burkinabè.

Salam Sondé
Kaceto.net