C’est l’événement majeur de l’audience d’hier au palais de justice. Comme s’ils s’étaient donné un mot d’ordre, les avocats se mettent tous debout. En l’absence de Me Titinga Frédéric Pacéré, c’est la doyenne, Me Antoinette Ouédraogo qui prend la parole. Elle annonce la décision de tous les avocats de quitter le procès parce que la Haute cour de Justice ne respecte pas le droit. Quelques applaudissements fusent, un malaise s’installe. Ils quittent donc la salle. Les juges aussi se retirent. Une heure et demie, plus tard, ils reviennent annoncer que le procès est reporté dans une semaine, soit le lundi 15 mai 2017.
L’affluence était encore forte en cette troisième tentative de début du procès des membres du dernier gouvernement de Blaise Compaoré. Après l’installation de toutes les parties, le président de la Haute cour de Justice annonce de nouveaux témoins et demande au parquet de faire la lecture de leurs noms. Plusieurs responsables de la gendarmerie et de la police sont cités, notamment Lazare Tarpaga l’ancien DG de la police nationale. Ce fût pratiquement tout pour la partie calme de l’audience.
Les avocats sont toute suite montés au créneau avec trois exceptions portant toutes sur le même sujet. La loi régissant le fonctionnement de la Haute Cour de Justice serait anticonstitutionnelle à leur avis et ils saisissent le Conseil Constitutionnel pour trancher. Se succédant à la barre, Me Mamadou Traoré, l’ancien bâtonnier, Me Bouyain qui représente notamment le premier ministre, Me Bâ, sans oublier Me Antoinette Ouédraogo abondent tous dans le même sens.
Les contestations timides du procureur général n’y feront rien. Les avocats ne lâchent rien. « Nous nous basons sur des textes de loi pour parler ; que le procureur cite des textes qui appuient ses dires », lanceront-ils, sûrs de leur coup.
Suspension d’audience pour 45 minutes, annonce alors le président de la Haute Cour de justice. Mais visiblement, ce sera plus compliqué que prévu. Les juges mettront près de 3h 30 minutes avant de revenir dans la salle.
Les avocats avaient basé leur requête de consultation du conseil Constitutionnel sur deux points ; le premier est que la Haute Cour de Justice a été créée en juin 2014 et ne saurait donc connaitre des affaires survenues en octobre 2014. Le deuxième point est que les décisions rendues par la Haute Cour de Justice ne sont pas susceptibles d’appel alors que la constitution garantit le droit à l’appel pour toute décision de justice.
La cour décidera donc au bout de la très longue pause de déclarer les requêtes des avocats sans fondement et de poursuivre le procès après une heure de pause. Mais les avocats n’ont pas voulu s’en laisser compter. « Avant que vous ne preniez votre pause, j’aimerai intervenir », interpelle Me Antoinette Ouédraogo, qui annonce que les avocats se retirent du procès.
De retour d’une pause qui aura aussi duré plus d’une heure, les juges demandent aux accusés, désormais seuls et sans avocat, comment ils comptaient procéder ; « l’affaire est trop complexe pour que nous répondions sans conseil », répond l’ancien premier ministre Luc Adolphe Tiao. Sur ce, le président de la Haute Cour de Justice annoncera la suspension du procès qui reprendra donc le lundi 15 mai à 9h.

Hermann Wendkouni Nazé
Kaceto.net