La commune rurale de Moussodougou, localité située à 65 kilomètres au Nord de Banfora, était en effervescence, le vendredi 16 juin 2017. Conduite par des activistes du Mouvement citoyen « Y en a marre », une foule d’environ 300 personnes, remontée contre la gestion du maire Dominique Sourabié, a exprimé son désarroi à travers une marche de protestation pour réclamer sa démission.

Moussodougou, jusque-là paisible, a connu, le vendredi 16 juin 2017, sa première fronde sociale. En effet, environ 300 habitants sont sortis dans les rues pour manifester leur ras-le-bol, contre la gestion du maire Dominique Sourabié, un pharmacien exerçant à Ouagadougou. Les initiateurs de la marche qui s’attendaient à une forte mobilisation, ont dû revoir leur ambition à la baisse. Dame nature s’est invitée à la marche avec une pluie matinale. Mais ce jour n’était pas choisi au hasard. C’était le jour de marché et les organisateurs pouvaient compter sur certains usagers du marché venus des villages environnants. Initialement prévue pour 7 heures 30 mn, c’est finalement après 10 heures que la marche démarre dans un tintamarre mêlé de coup de sifflets, de cris, de slogans et de musique. Parmi le groupe de marcheurs, la présence de vielles femmes ne passent pas inaperçus. Des spatules et des balais sont brandis en signe de désapprobations notamment par les hommes et les femmes. Sur le trajet menant à la préfecture, le nom du maire Dominique Sourabié et ses proches collaborateurs sont sur toutes les lèvres. Ils sont vilipendés à travers des mots durs. De loin, la voix perçante du président du mouvement citoyen « Y en a marre », Ouss Hébié, reggaeman, Ousmane Hébié à l’état civil, natif de Moussoudou, amplifiée par un microphone dressé sur un taxi moto « déchire » le ciel. « La commune de Moussodougou a connu beaucoup de difficultés, ces dernières années dues au maire. Il y a eu trop de problèmes et les parents ne savaient pas ce qu’ils fallaient faire. Finalement, on a pensé que si on ne se lève pas, le développement de notre cité va prendre un coup », a- t-il, martelé l’air amer, avant de renchérir que « la pourriture du CDP combattue les 30 et 31 octobre 2014 renaît de ses cendres depuis la réélection de Dominique Sourabié comme maire ». Entouré de quelques personnes dites victimes du maire, Ouss Hébié égrène les exemples. Il y a cette tentative d’expropriation du verger à Dou, appartenant à un malvoyant. La silhouette voûtée, Satourasè Sourabié, un sexagénaire est extirpé de la foule pour donner sa version. Le visage ferme, il soutient avoir cédé et gracieusement une portion de son verger pour l’aménagement d’une paillote en vue d’abriter provisoirement des salles de classe de la nouvelle école primaire publique. Cela remonte à trois ou quatre ans, dit-il.

Une affaire du pylône de l’ONATEL à Mondon

Cette année, il est question de construire l’école en matériaux définitifs. Approché par les habitants, il n’a pas trouvé d’inconvénients à céder encore gratuitement, un nouveau site de 4 hectares situé, selon lui, à 600 mètres du verger puisque le domaine scolaire doit s’étendre sur deux hectares. Construire des bâtiments sur le site serait synonyme de la disparition de son verger dont il tire l’essentiel de ses revenus pour assurer la scolarité de ses enfants. Ce qui n’a pas été, selon lui, du goût du maire, qui a tenu à implanter lesdits bâtiments dans le verger, et ce, malgré le refus catégorique du vieux Sourabiè, et même l’avis défavorable du service technique de l’éducation. Le propriétaire du verger, de confier qu’à sa surprise, le maire est passé à la vitesse supérieure, le 1er juin 2017 en ordonnant la destruction d’une dizaine de pieds de manguiers pour implanter les bâtiments en violation de ses droits de propriétaire. En réaction, des proches du vieux sont allés refermer les tranchées creusées par l’entrepreneur. Ce qui n’a pas été du goût du maire qui a aussitôt introduit une plainte devant le procureur à Banfora contre le vieux Sourabié « d’avoir détruit l’école ». Interrogé sur cette affaire, le chef de circonscription de base de Moussodougou, Clotaire D. Dabiré confie que « depuis que je suis ici, je n’ai jamais été associé à une construction d’école » citant une demi-dizaine de cas où des bâtiments réceptionnés se sont écroulés un mois après ou sont hors d’usage. La conséquence, de son avis, est qu’aucune de ces écoles construites par le même entrepreneur n’est fonctionnelle, obligeant les élèves à s’abriter sous des paillotes. « C’est une grande perte », a-t-il déploré. Alors que le contentieux entre la maire et le propriétaire du verger s’est répandu dans le village, Clotaire D. Dabiré qui affirment entretenir des rapports difficile avec l’édile a, selon ses dires, effectué le déplacement à Dou et aurait donné un avis contraire à la construction de l’école au sein du verger : « Ca frappe à l’œil et il n’y a même pas de débats quand on se rend sur le site car toute création d’école doit respecter des normes techniques et environnementales ». En d’autres termes, ériger l’école est synonyme à la destruction totale du verger. « Je crois qu’il y a d’autres considérations », a confié M. Dabiré annonçant au passage, son départ de Moussodougou après la proclamation des résultats du CEP. Cet entêtement du maire à ériger l’école sur ce site, révèle un fils de la localité tient à une promesse électorale : celle d’ériger l’école en matériaux définitifs dans un de ses fiefs. En plus du contentieux de verger qui continue de polluer l’atmosphère à Moussodougou, il y a aussi cette affaire confuse d’implantation d’un pylône de l’ONATEL à Mondon, village situé à 10 km de Moussodougou qui défraie la chronique. Là aussi, le chef de terre, Sidiki Sourabié pointe du doigt le maire. Il le soupçonne fortement sur fond de mépris de l’avoir floué et promet de brandir bientôt des preuves. Joint au téléphone pour les deux affaires et bien d’autres, le maire Dominique Sourabié décide esquiver les questions et préfère jouer à l’apaisement, promettant de régler notamment l’affaire de Dou à l’amiable. Mais pourquoi, a- t-il porté plainte contre le vieux Satourasè Sourabié, s’il existe des voies de dialogue ? En tout cas, des voix s’élèvent de plus en plus contre son maintien. D’ailleurs, dans « l’appel à mobilisation »transmis au préfet, Inoussa Ouédraogo, le 15 juin, avec ampliation au haut-commissaire de la Comoé et au gouverneur des Cascades, le Mouvement « Y en a marre » soutenu par une frange de la population, exige le départ du maire, de son secrétaire général et de la 1re adjointe. En cas de refus, ils donnent rendez-vous à la population, le mercredi 21 juin prochain pour déloger le personnel, fermer les locaux de la mairie et remettre les clés au préfet. Aux dernières nouvelles, les partisans du maire seraient en train de sonner la mobilisation pour donner une réplique adéquate à cette fronde et annoncent une contre marche pour le vendredi 23 juin.

AIB