"Tueur politique", bosseur, généreux, sectaire, etc., les qualificatifs ne manquent pas pour décrire la personnalité de Salifou Diallo, décédé le 19 août à Paris et inhumé dans son ville natal, Ouahigouya le 25 août. Assurément, le défunt président de l’Assemblée nationale ne laisse personne indifférent.
Notre confrère Sayouba Traoré qui l’a connu et l’a côtoyé le décrit comme un père de famille dont la disparition déstabilise fortement ses enfants.

Quelles relations entreteniez-vous avec salif Diallo ?

Il faut dire que Salif Diallo et moi venons de la même ville, (Ouahigouya). C’est un ami d’enfance, quelqu’un que j’ai côtoyé de son vivant et nous avons également des liens familiaux. D’ailleurs, nous sommes tous deux natifs du quartier Bingo de Ouahigouya et nous sommes également de la même génération, sauf que moi, je suis plus âgé que lui de deux ans.
Dans le temps, il y avait l’Association des scolaires de Ouahigouya (ASO) dans laquelle nous avons milité. Salif était l’un des dirigeants et animateurs de l’Association et moi, j’en étais membre.
Plus tard, chacun a entamé une vie professionnelle, mais il était très probable que nos chemins se croisent à nouveau parce que lui était engagé dans l’action politique, et moi dans l’analyse politique. Je me souviens qu’en 2004, nous nous sommes affrontés dans les colonnes de « L’Observateur » à propos de la rétroactivité de la loi qui permettrait au Compaoré d’être candidat à l’élection de 2005. Mais c’était en toute amitié et l’affrontement portait sur les idées. Contrairement à ce qui se dit au Burkina, comme quoi il n y a pas d’adversaires politiques, mais des ennemis se trompent.

Etes-vous surpris par la forte mobilisation autour de la mort de Salif Diallo ?

Pas du tout, Salif était un grand homme et il fallait assister à un de ses meeting pour vraiment le savoir. C’était une personne qui savait parler aux gens, il parlait au cœur des gens. C’est vrai qu’on n’était pas tout le temps d’accord avec lui mais, il faut reconnaître en lui un homme très dynamique. Sa perte va surement laisser un vide dans la vie politique burkinabè. Il a apporté beaucoup au Burkina Faso même si ce n’est pas quantitativement ni qualitativement appréciable. Son engagement ne peut pas être remis en doute. La mort de Salif Diallo est perçue comme la perte d’un père de famille. Chaque membre de la famille se demande alors ce qu’il deviendra après la mort du père.

Salif Diallo a-t-il tenté de vous faire prendre la carte du MPP ?

Non, pourquoi l’aurait-il fait ? Si je le voulais, il n’aurait pas eu besoin de me le dire ; j’aurai été moi-même prendre la carte du parti. Je pense que les gens de ma génération n’ont pas besoin qu’on leur dise d’aller prendre telle ou telle carte d’un parti. Je ne sais pas si la génération de maintenant est contrainte de le faire. Je me donne les moyens de décider par moi-même si je veux oui ou non faire quelque chose. Mes proches me connaissent pour sa.
Pour revenir à votre question, il faut dire que cette question ne s’est jamais posée entre nous pour la simple raison que pour les hommes de ma génération cet engagement est totalement personnel

Pour les ressortissants de Yatenga, c’est un frère très influent qui disparait. Etes-vous tenté par une carrière politique ?

Pour faire une carrière politique, il faut avoir l’adhésion des gens, il faut avoir de l’appétit pour la chose. Je me pose des questions pour le moment !

D’aucuns disent qu’après le départ de Salif Diallo, c’est la fin du MPP. Qu’en pensez-vous ?

Depuis que je suis né, j’ai toujours entendu les gens lire dans la boussole pour parler de politique et malheureusement, la boussole s’est toujours égarée. Personne ne peut dire ce qui va arriver demain. Comment voulez-vous que tout un mouvement qui a rassemblé 53% de l’électorat burkinabè, qu’un beau jour, quelqu’un s’asseye, et comme par miracle, déclare que c’est la fin de ce parti ?

Propos recueillis par Frédéric Thianhoun
Kaceto.net