Le monde de la finance a été secoué cette semaine par les révélations des
« Paradise Papers ». Issues de millions de documents secrets que le consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a pu se procurer, elles montrent les astuces des multinationales et des grandes fortunes du monde pour échapper à l’impôt.
Denis Dambré rend hommage aux journalistes pour ce travail qui fait avancer la justice et la démocratie.

On est souvent prompt à critiquer les médias lorsqu’ils ne sont pas rigoureux dans le traitement de l’information ou lorsqu’ils font preuve de connivence avec les pouvoirs publics. Mais les révélations des « Paradise Papers » offrent l’occasion de leur rendre hommage. Je pense en particulier aux journalistes d’investigation qui, parfois au péril de leur vie, enquêtent et divulguent des informations secrètes dans le but de faire avancer la justice et la démocratie.

Qu’est-ce que les « Paradise papers » ? Le consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) a pu entrer en possession de 13,5 millions de documents confidentiels dont la plupart provient d’Appleby, un cabinet d’avocats spécialisés dans la finance offshore et installé aux Bermudes.
Ces « Papers » mettent en évidence les mécanismes d’optimisation fiscale des multinationales et des grandes fortunes du monde.

En clair, ils montrent, preuves à l’appui, les astuces des grandes entreprises et des stars pour échapper à l’impôt, notamment par la domiciliation de leur siège social ou de leurs avoirs dans des paradis fiscaux tels que Les Bermudes, le Vanuatu, Malte, Jersey, l’île de Man ou les îles Caïmans. Ainsi, on découvre que Google, Apple, Facebook, Amazon ou Nike sont des champions de l’optimisation fiscale. Mais également le chanteur Bono, le champion de Formule 1, Lewis Hamilton, la chanteuse Shakira, deux secrétaires d’Etat de l’administration Trump, la firme française Dassault Aviation, le milliardaire français Bernard Arnault ou même la reine d’Angleterre.

En soi, les trouvailles de ces évadés fiscaux sont légales. Car il faut distinguer la fraude fiscale qui est illégale de l’optimisation fiscale qui utilise les failles de la législation pour échapper aux règles. Ils sont simplement aidés par le fait que nous vivons dans un monde où, pour peu qu’on soit nanti, on trouve toujours sans peine des terres d’accueil. Mais, sur le plan moral, l’expatriation de sa fortune dans des paradis fiscaux pose un gros problème. Car, dans un pays, l’impôt vise à faire ruisseler, sous la forme de services, la fortune des riches sur les pauvres ; ce qui constitue le pilier de la solidarité nationale. Le riche qui paie des impôts fait profiter à ses concitoyens de la fortune qu’il a acquise grâce à leur concours direct ou indirect.

En effet, aurait-il acquis sa fortune sans l’organisation sociale qui l’a vu naître et grandir ? Les dirigeants des grandes entreprises qui réalisent l’essentiel de leurs bénéfices dans des pays qu’ils s’empressent de déserter dès qu’on leur parle de fiscalité montrent par là qu’ils n’ont rien compris à la solidarité nationale. En agissant ainsi, ils plantent des coups de couteau dans le dos de la démocratie et de la justice sociale au nom de leur égoïsme malsain. Et cela est d’autant plus choquant lorsqu’il s’agit de stars, comme Bono, qui cultivent une image de philanthropes.

Denis Dambré
Kaceto.net