Le Président rwandais Paul Kagamé a été désigné, par ses pairs africains, pour succéder à son homologue guinéen Alpha Condé à la Présidence tournante de l’Union Africaine. Le passage de témoin s’est déroulé ce dimanche, à l’issue du 30ème sommet de l’Organisation, tenu à Addis-Abeba en Ethiopie avec pour thème,
« Gagner la lutte contre la corruption : un chemin durable vers la transformation de l’Afrique »

Le nouveau Président en exercice de l’Union Africaine aura en charge la mise en œuvre une série d’importants projets visant principalement à accélérer l’intégration du continent. Parmi ceux-ci figurent notamment la Zone de libre-échange continentale (ZLEC), la libre circulation des personnes et des biens et l’application de la décision de Yamoussoukro sur la création d’un marché libre et unique du transport aérien en Afrique.

D’autres chantiers font également partie de l’agenda de Paul Kagamé. Il s’agit, entre autres, de la lutte contre la corruption, des défis démocratiques et sécuritaires, de la crise migratoire, etc.

Selon les estimations de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (UNECA), la mise en œuvre de la ZLEC permettra d’augmenter de 53,2 % le commerce intra-africain en éliminant les droits d’importation. Ou même de le doubler si les barrières non tarifaires étaient également réduites.

Quant au Marché unique du transport aérien en Afrique (MUTAA), il devrait permettre la création de nouvelles opportunités pour promouvoir le commerce et les investissements transfrontaliers dans les domaines de l’industrie manufacturière et des services, dont le tourisme. Une initiative qui conduira à créer 300 000 emplois directs, et deux millions d’emplois indirects, selon Amani Abou-Zeïd, Commissaire de l’UA aux infrastructures et à l’énergie.

Pour ce qui est de la corruption, elle fait perdre à l’Afrique environ 148 milliards $ par an, selon la Secrétaire exécutive de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA), Vera Songwe.

Un autre chantier, et non des moindres, à mener par le Président Paul Kagamé sera la mise en œuvre d’une réforme (dont il est l’initiateur) instaurant, entre autres, l’indépendance financière de l’UA vis-à-vis de ses partenaires ou encore la réduction du nombre de sommets par an. L’on se rappelle que le Président rwandais avait, lors 29ème sommet de l’Organisation tenu les 3 et 4 juillet 2017 à Addis-Abeba, présenté un rapport explorant des pistes d’autofinancement pour l’UA, dont le budget reste largement dépendant de l’aide des partenaires internationaux (à hauteur de 73,79% en 2017).

S’exprimant ce dimanche lors du passage de témoin, le Président en exercice sortant de l’UA, Alpha Condé a déclaré, à cet effet, qu’une « autre étape décisive que notre institution doit franchir, concerne la mise en œuvre de nouveaux mécanismes de financement. Il est indispensable de poursuivre sa mise en œuvre car il s’agit du moyen le plus sûr, pour nous, de résorber le déficit budgétaire chronique de notre organisation ».

Soulignant l’unanimité observée au niveau de ses pairs en ce qui concerne la nécessité de cette réforme, Alpha Condé s’est dit « heureux de constater que l’ensemble des chefs d’Etats adhère à la nécessité de doter notre organisation d’une autonomie financière. Car nous ne pouvons pas vouloir parler d’une seule voix et défendre l’honneur africain si nous dépendons de financements extérieurs ».

Révélant, dans le même temps, qu’à ce jour, « plus d’une vingtaine d’Etats ont commencé à appliquer cette mesure. Ce qui constitue un motif de satisfaction et d’espoir. Par ailleurs, une dizaine a commencé à s’engager dans le processus ».

A l’endroit de ceux qui n’avaient pas encore commencé à appliquer cette mesure, Alpha Condé a déclaré qu’il comprenait « les préoccupations exprimées par certains Etats membres ». Tout en les encourageant à « travailler avec l’unité en charge du suivi de la mise en œuvre de la réforme que nous avons unanimement approuvé ».

Paul Kagamé, dont le mandat à la tête de l’UA durera un an, passera le flambeau en 2019 à son homologue égyptien Abdel-Fattah al-Sisi.

Notons enfin que le Président du Nigéria, Muhammadu Buhari a été désigné, à l’issue de ce 30ème sommet de l’Union Africaine, comme le champion de l’année concernant la lutte contre la corruption.

Borgia Kobri/Agence ECOFIN