L’ancien vice-président du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP) Salifou Sawadogo a nié mardi devant la barre du Tribunal militaire de Ouagadougou, avoir commandité l’incendie du domicile de l’ancien président de l’Assemblée Nationale, durant le putsch septembre 2015.

Selon l’ancien 4è vice-président du CDP Salifou Sawadogo,Salif Diallo est « un grand homme politique » avec lequel, il a eu à travailler. « On a eu un parcours politique divergent à un moment donné mais personnellement, je ne peux pas demander de brûler sa maison » a-t-il affirmé.
Il a expliqué que le 18 septembre 2015, à son arrivée au rond-point des martyrs où étaient rassemblés des militants de son parti, il a vu une fumée loin de là.
Il s’est renseigné selon ses dires et des militants lui ont appris que c’était des militaires qui avaient brûlé le domicile du défunt président de l’Assemblée nationale Salif Diallo.« J’ai trouvé cela regrettable » a-t-il affirmé.
Pourtant lors de son passage devant le Tribunal militaire les jeudi 4 et vendredi 5 octobre dernier, Abdoul Karim Baguian dit Lota, militant CDP a affirmé que le 17 Septembre 2015, au rond-point des martyrs, c’est sur instruction de Salifou Sawadogo que des jeunes ont décidé de se rendre au domicile de Salif Diallo pour l’incendier.
Ce mardi devant le Tribunal militaire, Salifou Sawadogo pense qu’« Il faut être fou pour qui connait Salif Diallo, de s’arrêter dans la foule pour demander d’aller brûler sa maison ». L’accusé dit avoir la conscience tranquille face à cette accusation car il a eu l’occasion d’exprimer son innocence à l’intéressé (Salif Diallo) avants on décès (en août 2017).
Salifou Sawadogo est poursuivi pour trois chefs d’accusations à savoir complicité d’attentat à la sûreté de l’Etat, meurtre sur 13 personnes et coups et blessures sur 42 personnes. Il a plaidé non coupable.
Selon son récit des faits, il était dans la matinée du 16 septembre 2015 au siège de son parti avec le président Eddie Komboïgo, les vice-présidents Achille Tapsoba, Léonce Koné, Fatou Diendéré (l’épouse du Général Gilbert Diendéré) et le secrétaire général Ollo Anicet Pooda.
Il a expliqué qu’ils procédaient au remplacement des candidats de leur parti dont les candidatures avaient été invalidées pour les élections de 2015 et préparaient la réunion du Bureau Politique du parti pour l’après-midi.
C’est dans la mi-journée, à la fin de leur rencontre, qu’ils ont appris, selon ses dires, l’arrestation des autorités de la Transition.
La direction du parti se serait de nouveau rassemblée au siège du parti pour chercher à comprendre ce qui se passait, sans possibilité pour eux, d’avoir plus de précision, a-t-il noté.
Selon Salifou Sawadogo, ils ont plutôt été alertés sur l’imminence de l’incendie de leurs domiciles.
Une alerte qui leur a rappelé selon lui, l’insurrection populaire de 2014, pendant laquelle, a-t-il affirmé, plusieurs de leurs responsables ont vu leurs biens partir en fumée.
Pour ne plus revivre la même situation, Salifou Sawadogo a affirmé que la direction de son parti avait décidé de prendre des mesures pour assurer la protection de leurs biens.
A cet effet, il a expliqué que le président du parti Eddie Komboïgo a remis 15 millions de FCFA au 1er vice-président Achille Tapsoba qui a son tour lui a remis 10 millions pour mobiliser les militants CDP du Kadiogo (Ouagadougou).
Cette somme a été repartie selon Salifou Sawadogo, aux structures provinciales du CDP du Kadiogo pour assurer la sécurité des domiciles des responsables du parti.
« On s’est servi de ces 10 millions pour assurer la sécurité de nos domiciles » a-t-il affirmé. A la suite de cette répartition, ils auraient quitté le siège pour leurs domiciles respectifs afin de respecter le couvre-feu.
C’est à domicile que Salifou Sawadogo dit avoir appris vers 19 heures par échange téléphonique que le siège du CDP était en train de brûler. « Comment cette sécurité de vos domiciles devaient s’organiser sur le terrain ? » a demandé le parquet militaire. « Il revenait à chaque arrondissement de s’organiser. Si d’aventure, ils apprenaient l’information imminente sur l’incendie du domicile d’un responsable, les militants devaient se rendre sur les lieux pour inviter les incendiaires à ne pas le faire », a répondu l’accusé.
Selon l’accusé, ils ont été traumatisés pendant l’insurrection populaire par les incendies de leurs domiciles.
Dans la matinée du 17 septembre 2015, dès la proclamation du coup d’Etat, Salifou Sawadogo dit avoir appris que des militants de son parti se sont réunis au rond-point des martyrs sur appel du secrétaire général de la province du Kadiogo Noel Souwerma.
« J’y suis allé et j’ai échangé avec eux sur les questions de sécurité et sur l’inclusion. J’estimais que notre voix devait être entendue par les chefs d’Etats de la CEDEAO qui devaient arriver à Ouagadougou (pour la médiation) », a-t-il affirmé.
Salifou Sawadogo dit avoir invité les militants du CDP à faire le tour de leur zone de rassemblement en scandant des slogans d’inclusion pour les élections de 2015.
Le parquet militaire a rappelé que contrairement aux dires de l’accusé, Noel Souwerma a déclaré qu’il a reçu des instructions de la direction du parti notamment de Salifou Sawadogo pour l’organisation du rassemblement au rond-point des martyrs. « Il vous a donné sa version des faits. Dans la réalité, c’est vrai que les secrétaires généraux reçoivent des instructions mais ils peuvent prendre aussi des initiatives », a estimé Salifou Savadogo.
Selon Salifou Sawadogo, il faut faire la distinction entre soutenir l’inclusion et soutenir le coup d’Etat, qu’il dit condamner. « Ma volonté de voir l’inclusion était forte et remonte avant le coup d’Etat » a-t-il affirmé.
« Durant la période du coup d’Etat, avez-vous rencontré le Général Diendéré ? » a demandé le parquet militaire. « Oui, j’avais été invité par Fatou Diendéré (ancienne 5èmevice-président du CDP) à leur domicile. On échangeait sur l’évolution du coup d’Etat. Elle déplorait les morts. Le Général Diendéré est arrivé, je l’ai salué, j’ai pris une photo avec lui à cause de sa tenue et je suis parti », a répondu l’accusé.
« L’avez-vous félicité ou salué ? » a relancé le parquet militaire.
« Je n’ai pas souvenance si je l’ai félicité. Ça peut être des civilités. A titre personnel, je n’ai pas soutenu le conseil national de la démocratie (CND). A ma connaissance, le CDP ne l’a pas aussi soutenu. On a des camarades qui ont pris des positions que je respecte et dont je refuse de commenter », a affirmé l’accusé.
Dans le cadre de cette affaire, l’immunité parlementaire de Salifou Sawadogo qui avait été élu député du CDP dans le Kadiogo, a été levé sous la présidence du défunt président de l’Assemblée National Salif Diallo, rappelle-t-on.
L’audition de l’accusé se poursuit ce mercredi 24 octobre à partir de 9 heures au Tribunal militaire de Ouagadougou.

AIB