Au Sénégal, s’il y a une interview qui n’est guère passée inaperçue, ce mois d’août 2016, c’est bien celle d’Abou Abel Thiam (photo), président du collège de l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp). Il s’agit d’un entretien identique publié dans 4 journaux, à savoir : « Le Témoin »,« Libération », « Le Populaire » et« L’Observateur ».

L’affaire intéresse le Comité d’observation des règles d’éthique et de déontologie (Cored), une instance qui joue le rôle de tribunal des pairs au sein de la corporation des journalistes. « Le Cored ne peut pas comprendre que 4 organes de presse présentent à leurs lecteurs une même interview qui a le même titre et le même contenu et à la virgule près »,s’indigne Mamadou Thior, chargé de la communication du Cored, interrogé par la Radio Futurs Médias. Le Cored s’est donc autosaisi. Mamadou Thior annonce une enquête « pour savoir ce qui se cache derrière cette interview ».Il ajoute : « Des correspondances sont envoyées aux quotidiens concernés. S’il faut sanctionner, le Cored va le faire car cette affaire est extrêmement grave pour la presse. »
Dans l’interview en question, Abou Abel Thiam s’exprime sur l’actualité du Sénégal. Il revient notamment sur l’affaire Nafi Ngom Keita, ex-présidente de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac), qui contestait son limogeage par le président Macky Sall et envisageait de saisir la Cour suprême.
Abou Abel Thiam défend naturellement Macky Sall dont il est un proche, en plus d’être un cadre du parti au pouvoir, l’APR. L’Agence Ecofin a discuté avec 3 journalistes sénégalais qui ont requis l’anonymat. Tous affirment que les 4 journaux ayant publié l’interview d’Abou Abel Thiam appartiennent au groupe baptisé « La presse des 100 » ou « La presse du palais ». Il s’agit de cette presse qui défend le régime du président Macky Sall.
Nos sources doutent d’ailleurs que le Cored puisse prendre des sanctions ayant une quelconque portée. « Le Cored a décidé d’enquêter sur cette affaire mais on se demande ce qu’il peut vraiment faire en tant que structure quasi informelle, sans pouvoir, sans influence. Au mieux, ce serait un blâme ou un simple rappel à l’ordre », confie un des journalistes

Ecofin