La cinquante quatrième session ordinaire des chefs d’Etats des pays membres de la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est déroulée le 22 décembre 2018, Abuja, au Nigeria. Présidée par le président nigérian Muhammadu Buhari, cette session avait au menu, entre autres et la politique énergétique communautaire. Les chefs d’Etats se sont penchés aussi sur la situation politique au Togo, en Gambie et au Mali.

Après avoir examiné le rapport annuel 2018 du président de la Commission de la CEDEAO, Ibn Chambas, ainsi que des rapports issus de la 81ème session ordinaire du conseil des ministres de la CEDEAO et de la 41ème réunion du Conseil de médiation et de sécurité, les chefs d’Etat ont pris des décisions vidant à approfondir le processus d’intégration et à renforcer la paix et la sécurité dans l’espace communautaire.
Sur les programmes d’intégration régionale, la conférence "a pris note des perspectives en matière de croissance économique de la région avec un taux de 3,0%, par rapport à 2017 (2,3%). Cette amélioration de la croissance est consécutive à l’accélération de la croissance économique dans plusieurs pays de la Communauté et la consolidation du redressement de l’économie nigériane". Les chefs d’Etats ont toutefois regretté la faible diversification des économies et l’insuffisance de la transformation des matières premières exportées, toutes choses qui exposent les pays africains aux chocs exogènes. D’où la recommandation faite à chaque pays d’accélérer la diversification de son économie en mettant un accent particulier sur les filières porteuses de croissance.
S’agissant du projet de création de l’union monétaire, du régime de change et du modèle de la future banque centrale, la conférence s’est félicitée des résultats enregistrés par la commission depuis le sommet de Lomé de juillet 2018 et l’a invitée à constituer "un groupe de travail qui doit comprendre les représentants des Banques Centrales et des sachants dans les domaines ci-après : design, graphisme, économie, histoire, anthropologie, sociologie, sciences politiques, signes monétaires ou droit. Ce groupe sera chargé de proposer des noms et des signes pour la future monnaie unique au Comité ministériel".
Quant à la libre circulation des personnes et des biens, un des piliers de l’intégration, il a été décidé de faire un bilan de sa mise en oeuvre, quarante ans près son lancement lors du sommet de Dakar en 1979. La mise en oeuvre de la carte d’identité biométrique de la CEDEAO a été également recommandée afin de permettre aux titulaires de pouvoir circuler librement.
Les chefs d’Etats et de gouvernements ont également examiné le dossier relatif aux Accords de partenariat économiques (APE) entre l’Union européenne et les pays membres de la CEDEAO. Certains pays comme la Côte d’Ivoire et le Ghana ayant déjà signé des accords intérimaires, la conférence a demandé un délai supplémentaire sur le calendrier initial de leurs mise en oeuvre, le temps pour l’organisation régionale d’harmoniser la position commune aux 15 pays membres.
Les chefs d’Etats se sont par ailleurs félicités "du lancement du marché régional de l’électricité en Afrique de l’Ouest ainsi que de l’adoption des textes subséquents sur les sanctions à appliquer et la sécurisation des échanges électriques transfrontaliers pour améliorer la solvabilité et les performances des opérateurs dudit marché".

Actualité oblige, le retour des biens culturels volés par les Occidentaux durant la colonisation et/ou après, a été au centre des échanges. A cet égard, la commission de la CEDEAO a reçu la mission "de soumettre lors de sa prochaine session, un Plan d’action régional pour le retour des biens culturels africains".
Au plan sécuritaire, les attaques terroristes qui frappent plusieurs pays ont été condamnés et la coopération entre pays pour faire face à cette guerre a été vivement encouragée.
La situation politique au Togo où des élections ont eu lieu le 20 décembre 2018, mais boycottées par l’opposition, la Guinée-Bissau où en revanche les consultations accusent un retard par manque de kits électoraux, en Gambie où le processus de réconciliation est enclenchée par l’installation de "Commission Vérité, Réconciliation et Réparations" ou encore au Mali où la réélection du président Ibrahim Boubacar Keïta n’est pas reconnue par une partie de l’opposition, sont autant de sujets politiques qui ont été passés en revue lors du sommet d’Abuja.

Alors qu’on s’attendait à ce que la demande d’adhésion du Maroc à la CDEAO soit acceptée, le sujet n’a même pas été retenu lors de ce sommet. Un camouflet pour le Maroc et ses soutiens qui n’ont pas ménage leurs efforts ces derniers temps pour que le Royaume intègre l’espace communautaire d’Afrique de l’Ouest.

Dominique Koné
Kaceto.net