La nouvelle est tombée en début d’après-midi : le cinéaste burkinabè Saint-Pierre Yaméogo est décédé aujourd’hui même à son domicile à Ouagadougou des suites d’une longue maladie. Il avait 64 ans.
Troublion du 7è art burkinabè, la sortie de chaque film de Pierre Yaméogo était toujours un événement. Il tranchait dans le vif et se moquait des pleurnicheries que son oeuvre allait provoquer.
J’ai rencontré Pierre Yaméogo la première fois en 1998 à Paris. Il venait de terminer le montage de son film "Silmandé", un long métrage qui démonte les grenouillages pour ne pas dire plus, des hommes d’affaires libanais installés dans notre pays et qui siphonnent les revenus tirés de l’or par une corruption des élites dirigeantes.
Silmandé, c’est un opus résolument engagé contre la malgouvernance et les détournements des deniers publics qui n’a malheureusement pas pu être projeté dans certains pays où les salles de cinéma sont exploitées par ceux-là mêmes qu’il dénonce.
Son précédent film, Wendemi, sorti en 1993 pointait du doigt l’hypocrisie des hommes religieux, en l’occurrence les curés aux mœurs légères, ceux qui sermonnent les fidèles chaque dimanche pour leur inconduite pendant qu’eux-mêmes forniquent sous la soutane et sont auteurs de grossesses non assumées. Le film lui a valu d’être réveillé au petit matin par une foule de prêtres venue lui demander des explications.
L’actualité dans l’église de Rome depuis quelques années avec les scandales liés à la sexualité débridée des serviteurs de Dieu l’a sans doute bien amusé !
Avec "BAYIRI ", sortie en 2010, il a pointé sa caméra sur les violences dont sont victimes nos compatriotes installés en Côte d’Ivoire, les injustices qu’ils endurent au quotidien y compris lorsqu’ils se décident à rejoindre la mère patrie.
La caméra incisive de Pierre Yaméogo va nous manquer. Avec sa disparition, nous perdons un révolutionnaire qui appelait un chat par son nom.
Repose en paix et que les ancêtres te fassent une place parmi eux.

Kaceto.net