Après 18 mois de débats contradictoires, le procès du putsch manqué de septembre 2015 s’est finalement achevé hier 02 Septembre avec le verdict prononcé par le tribunal militaire. (http://kaceto.net/spip.php?article7078)
Quatre-vingt deux personnes étaient appelées à répondre de leurs responsabilités dans l’avènement de ce "coup d’état le plus bête du monde" et qui a interrompu pendant une semaine le cours de la Transition.
Comme on pouvait s’y attendre, le verdict est diversement est apprécié, mais au final, et en dépit des insuffisances que les avocats de la défense n’ont pas manqué de relever, ce qui prédomine, c’est le soulagement de voir que le procès est allé à son terme, que les accusés ont eu le temps de s’expliquer et que le verdict ne respire nullement la vengeance d’un camp sur un autre.

Pour Maître Guy Hervé Kam, un des avocats de partie civile, la tenue de ce procès est un très grand soulagement, même s’il pense que le tribunal a été clément avec les accusés. « Sur le verdict, nous disons que nous sommes totalement satisfaits, parce que nous disions dès le départ que chacune des parties avaient sa vérité et la plus importante des vérités était la vérité du tribunal ; notre souhait était que cette vérité se rapproche plus de la vérité des faits qui a été largement établie durant les audiences », s’est-il réjoui. Il estime que les peines prononcées contre les coupables "sont tout à fait clémentes, mais nous disons que notre objectif n’était pas la vengeance, notre objectif, c’était de savoir qui a fait quoi. Aujourd’hui, nous le savons de la bouche du tribunal et nous pensons que les victimes peuvent désormais se reposer », a t-il commenté, avant de préciser que "le 22 octobre, nous allons nous retrouver pour statuer sur les réparations. Vous comprendrez que toutes les victimes blessés et décédés ou ceux qui ont perdu des biens aurons sans doute des réparations à demander ».

Quant à Maître Olivier Yelkouni, un des avocats du général Gilbert Diendéré, il apprécie le fait que le tribunal n’ait pas suivi le parquet dans ces réquisitions, qui avait estimé que l’infraction de trahison était constituée. « Nous avons démontré effectivement que cette infraction est loin d’être constituée, donc sur ce point, nous avons été suivis par le tribunal qui a constaté effectivement que les éléments constitutifs de l’infraction de trahison n’étaient pas réunis. Il n’est resté que les infractions d’attentat à la sûreté de l’Etat, l’infraction de coups et blessures volontaires et d’incitation à commettre des actes contraires à la discipline. Ce sont ces infractions qui ont valu à notre client la peine de 20 ans de prison ferme », a-t-il confié à la presse. Le Général Diendéré compte t-il faire appel de la décision ? " Le dernier mot revient mon client", a t-il répondu.
Même réponse de l’avocate du Général Djibril Bassolé, qui a écopé d’une peine de prison de 10 ans. "Aucune condamnation n’est bonne à prendre" à commenté Maître Mireille Barry, indiquant vouloir prendre le temps de recueillir l’avis du Général de gendarmerie qui "comme vous le savez est malade et n’a pas pu être présent à l’audience".

Le procès est-il politique et n’a rien à voir avec la justice et la vérité sur ce s’est réellement passé le 15 septembre 2015 comme les avocats des mis en cause et certaines organisations de la société civile l’ont répété avant et pendant le procès ?
Réponse agacée de Maître Prosper Farama, un des avocats de la partie civile : "C’est du bla bla. Si des gens ont l’audace de prendre des armes au nom de leurs intérêts personnels et d’assassiner des fils et des filles de ce pays, et osent dire que c’est un procès politique, oui moi, je suis pour le procès politique. Parce qu’à leur temps, je le répète, ils n’ont donné aucune chance à ceux qui, semblent-ils, avaient simplement l’intention de faire un coup d’Etat », a-t-il laissé entendre, allusion au procès expéditif du capitaine Henri Zongo et du commandant Boukary Lingani et leur exécution en septembre 1989.
Visiblement irrité par ces critiques, Maître Farama conseille les coupables "de dire merci au peuple burkinabè, de leur avoir ouvert la voie de la démocratie, de l’état de droit qui permet, même lorsque qu’on a assassiné des dizaines de personnes au Burkina, d’être entendu, jugé, d’être quelque fois même menaçant, agaçant à l’égard du tribunal, arrogant à l’égard du peuple, et d’entendre une sentence qui ne nous amène pas à la potence. Cette histoire de procès politique, c’est du bla bla", a t-il conclu.

Frédéric Tianhoun
Kaceto.net