Face à la propagation du COVID-19, le Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP) interpelle le gouvernement sur l’urgence de mobiliser des moyens supplémentaires afin d’équiper les centres de santé et permettre aux agents de santé de combattre efficacement la pandémie.

En décembre 2019, une maladie de cause jusque-là inconnue, a émergé dans la ville de Wuhan (province de Hubei en Chine). Le 9 janvier 2020, les autorités sanitaires chinoises et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) annoncèrent officiellement au monde que cette maladie appelée COVID-19 est l’œuvre d’un nouveau virus appelé Coronavirus.

Les nombreux ravages causés par le COVID-19 ont amené l’OMS à déclarer cette épidémie comme urgence de santé publique de portée internationale, le 30 janvier 2020. Une quarantaine de jours plus tard, soit le 10 mars 2020, tous les pays de l’Union européenne étaient touchés par le COVID-19. Et dès le lendemain 11 mars 2020, l’OMS déclarait le COVID-19 comme une pandémie mondiale.

A la date du 28 mars 2020, l’on dénombre dans le monde 601 475 cas confirmés de COVID-19 et 27 889 décès (soit un taux de mortalité de 4,6%).

Un temps épargnés par la pandémie, les pays africains sont aujourd’hui frappés de plein fouet. Les premiers cas de COVID-19 ont été dépistés dans notre pays le 09 mars 2020. Ces cas ont concerné un couple de Burkinabè rentré de France le 24 février 2020. Quelques jours après ces premiers dépistages, deux autres foyers ont été découverts dans notre pays. Un foyer diplomatique à Ouagadougou et un autre à Houndé. Plusieurs membres du Gouvernement ont été déclarés positifs au coronavirus et placés en soins. A la date du 27 mars 2020, le Burkina compte 207 cas confirmés de COVID-19, 11 décès (soit un taux de mortalité de 5,3%, supérieur à la mortalité mondiale) et 21 guérisons, selon le Centre des Opérations de Réponse aux Urgences Sanitaires (CORUS).
Plusieurs villes comme Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, Houndé, Boromo, Dédougou, Kongoussi, Banfora, Sindou, Zorgho et Manga sont touchées par la pandémie et placées en quarantaine.

Le MBDHP présente ses condoléances aux familles et aux proches des personnes décédées et souhaite beaucoup de courage et un prompt rétablissement aux personnes infectées par la maladie.

Le Mouvement félicite le personnel de santé pour son courage, son dévouement et son abnégation, malgré ses conditions extrêmement difficiles de travail et l’encourage à encore plus d’ardeur, dans cette bataille acharnée contre ce mal qui ronge notre société.

En outre, le MBDHP invite les populations à respecter de façon scrupuleuse l’ensemble des mesures de prévention, notamment d’hygiène, de limitation de déplacements, ainsi que le couvre-feu, édictées en vue d’endiguer la pandémie. C’est le lieu pour le MBDHP de condamner les actes de torture et autres traitements inhumains et dégradants infligés par certains éléments des forces de défense et de sécurité (FDS) aux personnes appréhendées durant les heures de couvre-feu. Ces actes sont inacceptables dans un État de droit et ce d’autant plus que le Code de la santé publique prévoit une répression adéquate en cas de non-respect d’une mesure sanitaire. En tout état de cause, les éléments des FDS qui se rendent coupables d’actes de torture et de mauvais traitements, s’exposent eux-mêmes, aux sanctions prévues par la loi. Le MBDHP félicite l’ensemble des éléments des FDS qui, de façon professionnelle, contribuent au respect de la mesure de couvre-feu et des autres mesures restrictives prises par les autorités.

A l’analyse, la présence de la pandémie du COVID-19 au Burkina est d’autant plus inquiétante que visiblement, notre système national de santé est incapable de faire face à une épidémie de grande envergure. Les agents de santé manquent cruellement de moyens adéquats et efficaces, en vue, d’une part de se protéger et d’autre part, de prendre correctement en charge les malades. Il n’est en effet un secret pour personne, que le plateau technique médical national est l’un des plus faibles de la planète. Cette situation est la conséquence logique des politiques anti-sociales de privatisation du secteur de la santé, du pillage des richesses nationales et de l’irresponsabilité des "élites politiques" qui se sont succédées au sommet de l’État depuis près d’un demi-siècle. Ainsi, notre pays dispose à ce jour de moins de 20 appareils capables d’assurer l’assistance respiratoire pour les malades qui présenteraient des complications. Déjà, nos hôpitaux sont débordés et le gouvernement n’a jusqu’ici donné aucune information sur l’acquisition éventuelle d’équipements supplémentaires pour soulager le personnel soignant ainsi que les malades. De même, des recommandations de confinement ont été faites aux personnes ayant été en contact avec les personnes dépistées positives. Cependant, les autorités ne prennent aucune disposition pour s’assurer de l’effectivité de ces recommandations.

Le MBDHP constate avec amertume que notre gouvernement, dans cette situation d’extrême gravité, semble s’en remettre à la générosité d’États, eux-mêmes confrontés à cette même pandémie, pour acquérir des kits de dépistage, des masques et autres kits de protection. Pourtant, des ressources existent pour ce faire. Elles sont simplement mal gérées, sinon détournées à des fins personnelles ; en témoigne les nombreux scandales financiers régulièrement révélés par la presse, le REN-LAC et des organes de contrôle des finances de l’État. Aussi, plusieurs autres sources de mobilisation financière (compagnies d’exploitation minière, de téléphonie mobile, etc.) existent-elles et sont ignorées à dessein par les autorités.

Enfin, la plupart des États confrontés au Covid-19 procèdent à des prises de mesures sociales en vue de créer un climat social apaisé et d’améliorer la résilience des populations. Au Burkina, hélas, c’est tout le contraire. En effet, en plus de maintenir les décisions politiques controversées comme l’instauration de l’IUTS sur les primes et indemnités des agents publics, le gouvernement procède à des suspensions et à des coupures arbitraires et infondées de salaires, toutes choses qui contribuent à détériorer davantage un climat social déjà délétère.

Face à cette situation, le MBDHP invite le gouvernement à mettre en œuvre le droit des populations à la santé, en prenant des mesures concrètes et vérifiables pour stopper la propagation du COVID-19 et permettre l’accès du plus grand nombre à des soins de qualité.

Le MBDHP recommande ainsi au gouvernement de :

1. Procéder dans l’immédiat à :

o L’acquisition de masques adaptés et d’équipements de protection adéquats au profit des agents de santé afin de leur permettre de remplir leurs missions de manière plus efficace et dans de meilleures conditions de sécurité ;

o L’acquisition de kits de dépistage et à l’ouverture d’autres centres de dépistage dans les autres régions du Burkina ;

o L’amélioration de la prise en charge des malades confinés dans les centres de santé ou à leurs domiciles ;

o L’acquisition d’appareils d’assistance respiratoire pour une prise en charge adéquate des cas graves ;

o L’instauration d’un climat social apaisé, en mettant un terme aux mesures arbitraires de suspensions et de coupures de salaires et en procédant à la suppression de l’IUTS sur les primes et indemnités des travailleurs du public, du parapublic et du privé. Dans le même sens, le MBDHP encourage le gouvernement à proposer aux ménages les plus défavorisés, aux commerçants et autres acteurs du secteur informel concernés par les décisions de fermetures des marchés et yaars, des mesures d’accompagnement appropriées, afin d’accroître leurs capacités de résilience.

2. Procéder à moyen terme à la construction d’un système national de santé fiable, performant et efficace à travers notamment le relèvement de la qualité du plateau technique médical national et la dotation des centres de santé primaire, secondaire et supérieur, en équipements nécessaires à la prise en charge adéquate des différentes pathologies.

Ensemble, contribuons, par des actions citoyennes positives, à la lutte contre le COVID-19 !

Ensemble, exigeons du gouvernement la garantie de notre droit à la santé !

Ouagadougou, le 28 mars 2020

Le Comité Exécutif National