Relativement en retrait, du moins sur le plan médiatique, depuis l’apparition du covid-19 au Burkina Faso, le mouvement associatif a pourtant sa partition à jouer dans la gestion de cette pandémie. On le constate d’ailleurs à travers diverses initiatives de terrain.
Dans les lignes qui suivent, le président du Conseil d’Information et de Suivi des Actions du Gouvernement (CISAG), Issiaka Ouédraogo, nous donne la position de son organisation, au sujet de questions liées à la crise sanitaire actuelle.
Les propos recueillis en ligne, l’ont été avant l’annonce par le gouvernement, des dernières mesures concernant la date de réouverture des écoles.

Kaceto.net : Pouvez-nous nous présenter votre organisation, le CISAG et ses objectifs en tant qu’organisation de la société civile au Burkina Faso ?

Issiaka Ouédraogo : Le Conseil d’Information et de Suivi des Actions du Gouvernement (CISAG) est une organisation de la société civile, créée en 1998 et qui a pour principal but, d’expliquer les textes et lois votés à l’Assemblée nationale aux populations.
Sa vocation est de contribuer à travers des campagnes d’information, d’explication et de sensibilisation portant sur les actions, les décisions et les orientations politiques et de développement du gouvernement pour éclairer au mieux les citoyens, en vue de leur appropriation par ces derniers et leur implication dans la défense de leur mise en œuvre.
Le CISAG fait également la promotion de la démocratie, de la bonne gouvernance et de la défense des droits de l’homme à travers ses campagnes de sensibilisation, de formation et de veille citoyenne.

Votre organisation a récemment rencontré la presse pour évoquer avec elle, la question du covid-19 et sa gestion par les autorités. La situation actuelle le méritait réellement ?

Oui, la situation méritait que le CISAG sorte et s’exprime sur la question. Pour non seulement donner son avis concernant les mesures annoncées par le Chef de l’état, mais aussi, interpeller nos concitoyennes et concitoyens à faire preuve de responsabilité, de solidarité et d’unité, pour bouter ce fléau hors de notre pays.
Dans une période aussi difficile pour toute l’humanité et dans laquelle aucun pays n’est épargné, le CISAG se devait de parler à la population et donner son avis sur les mesures d’accompagnement décidées par le gouvernement.

Dans ces moments particulièrement difficiles, qu’elle est votre appréciation face à la gestion de la crise par les autorités ? Les mesures prises vous satisfassent-elles entièrement ? Notamment celles en faveur des couches vulnérables de la population ?

Les mesures annoncées par le Chef de l’état sont les bienvenues, et sont à encourager. Cependant, elles méritent de plus amples clarifications. Comme par exemple, l’interprétation faite par le ministère de l’Energie au sujet de l’application sectorielle des décisions présidentielles qui a viré à la confusion, selon la compréhension qu’en avait de la majorité des Burkinabé. D’où cette sortie du ministère de l’énergie qui s’imposait, en vue d’éviter des désagréments.

L’on apprend qu’un avion en provenance de Tunisie avec à son bord des passagers qui devaient initialement être mis en quarantaine dans une structure de la place se sont finalement rebellés et se sont échappés dans la nature. Votre commentaire ?

Si des passagers douteux ont pu s’échapper d’un avion pour rentrer dans la nature, cela est dû à l’incompétence ou à la négligence des services qui devaient être commis à la tâche. Des sanctions doivent donc être prises à la hauteur du forfait, après que toute la lumière ait été faite à ce sujet.

Il y a des polémique entre certains départements ministériels, Santé, Commerce, Recherche scientifique notamment, au sujet de la gestion de la pandémie. Comprenez-vous cela ?

Oui, je comprends cela. Car de tout temps, il y’ a toujours eu ce genre de polémiques au sein du gouvernement. Cela démontre l’amateurisme de certains ministres. Cela montre aussi encore une fois de plus, ce que le CISAG a toujours dénoncé. A savoir, le manque de solidarité gouvernementale et l’absence de cohésion. On voit ainsi des ministres qui désapprennent malgré la haute fonction qu’ils occupent. Et cela n’honore pas le Chef de l’Etat d’être aussi mal entouré. Et plus encore, cela crée plus de distance entre les populations et les gouvernants, les premiers ne pouvant que se méfier des seconds.

Un texte circulant sur les réseaux sociaux fait état de ce que le parti au pouvoir, le MPP à travers certains de ses structures aurait demandé la démission de la ministre de la santé, démission déposée semble-t-il puis refusée par la suite. Cela vous inquiète-t-il ?

Oui, c’est une situation inquiétante, si la rumeur est effectivement fondée.

De manière plus globale, que peut-faire le mouvement associatif pour contribuer à la lutte contre le covid-19 ?

Les mouvements associatifs peuvent et doivent faire passer l’information et veiller à la sensibilisation pour jouer leur partition, dans cette lutte contre le coronavirus. C’est très important.

Selon vous, les Burkinabé comprennent-ils suffisamment l’urgence de la situation actuelle par leur attitude et leur comportement ?

Les burkinabé comprennent plus ou moins la situation. Mais il faut aussi reconnaître et admettre que la cacophonie qui prévaut parfois dans les instances de décision, du fait des autorités elles-mêmes, et autour de la médiatisation de la pandémie, fait douter bon nombre de personnes qui croient que la maladie est politique, juste bonne pour ‘’bouffer’’ l’argent du pays.

Ici où là, il y a des mouvements de revendications dont celui des tenanciers de maquis et débits de boissons qui demandent des mesures d’accompagnement en faveur de leur secteur, tandis que d’autres acteurs de la culture réclament aussi leur part d’un fonds mis en place par les autorités. Comment appréciez-vous tout cela ?

Ces mouvements de revendication ne peuvent pas manquer. Seulement, l’Etat a ses limites et ne peut as satisfaire toutes les revendications. D’où la nécessité d’avoir une approche globale qui tienne compte de toutes les spécificités

Partout dans le monde, le covid-19 a été l’occasion de restreindre les libertés individuelles et collectives, la liberté de manifester, report des élections ou des processus électoraux... Comment en tant qu’organisation engagée dans la promotion de la démocratie et des droits humains, voyez-vous cela ? C’était nécessaire ou y a-t-il un risque pour la démocratie ?

Oui, le CISAG estime qu’il y’ a eu un grand bouleversement dans tout le monde entier du fait de cette situation. Cependant, cela ne doit et pourra pas nous empêcher de tenir les élections couplées, législatives et présidentielle à la date indiquée, ceci afin de ne pas tomber dans un vide juridique qui pourrait avoir des conséquences assez préjudiciables pour notre démocratie. Tout en espérant que les jours à venir seront meilleurs, le CISAG appelle tous les acteurs politiques à la responsabilité et à plus d’engagement.

Propos recueillis par Juvénal Somé
Kaceto.net