KACETO.NET renforce son équipe avec l’arrivée de deux collaborateurs, Florent Maré et Saïdou Nikièma, tous des économistes qui s’apprêtent à soutenir leurs thèses de doctorat à l’UFR Sciences Économiques et de Gestion de l’Université Thomas Sankara
Je leur ai confié une mission : rendre l’économie accessible aux lecteurs en démystifiant les concepts économiques et éclairer dans un langage simple et distinct, les mécanismes de fonctionnement de l’économie nationale et internationale.
A quelques semaines du double scrutin présidentiel et législatif, ils nous aideront à décortiquer, comprendre et apprécier la crédibilité des programmes économiques des candidats à la magistrature suprême.
Voici pour commencer, le premier article, consacré à la réception hier 27 août à l’Université Norbert Zongo de Koudougou, de la station au sol du projet Burkina Sat 1. Un projet que d’aucuns pourraient qualifier de superflu dans un pays en quête d’autosuffisance alimentaire.
Florent Maré montre justement l’apport de ce projet dans l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire dans notre pays et les moyens qu’il nous offre de prévenir les catastrophes naturelles.
Joachim Vokouma
DP, KACETO.NET

Initiative du Pr Frédéric Ouattara, meilleur physicien spatial d’Afrique 2018, la première phase du projet, la construction de la station au sol est terminée. Elle est opérationnelle et a été réceptionnée officiellement hier jeudi 27 août 2020 à l’Université Norbert Zongo. La deuxième phase sera la construction du cube satellite avant de passer à la phase du test. Un projet ambitieux qui nourrit l’espoir et la fierté des Burkinabè. Quelles peuvent être les retombés économiques d’un tel projet ?
Devenu de plus en plus accessible même pour les pays en développement, l’espace est devenu un lieu de compétition économique. Le poids du secteur dans le système économique mondial ne cesse de croître. L’espace est devenu particulièrement stratégique au maintien de la puissance économique des pays développés. Les enjeux économiques sont particulièrement liés à des secteurs stratégiques comme les télécommunications, la surveillance des catastrophes naturelles, la cartographie… qui sont importants pour l’Etat ou les entreprises. Les retombés économiques directes touchent par exemple le commerce ou l’emploi et celles indirectes l’innovation et les progrès technologiques.

Initialement du fait des Etats, la concurrence sur la conception et le lancement des satellites s’est élargi au privé. Une société privée comme SpaceX mise sur la capacité à fabriquer des fusées partiellement réutilisables, à moindre coût pour proposer des prix compétitifs sur le marché international.
Il est vrai que les satellites coûtent chers et leurs opportunités pour les pays pauvres sont souvent remises en cause. D’aucuns estiment qu’il s’agit d’un gaspillage des ressources, qui sont pourtant précieuses pour les populations pauvres. Pour "Burkina Sat1", le Pr Frédéric Ouattara répondait déjà : « Ne regardez pas le coût, regardez plutôt ce qu’il va apporter au pays, le service qu’il va rendre. Le satellite va rendre plus de services que ce que nous allons investir ». Burkina Sat1 serait estimé à plusieurs centaines de millions de FCFA (Le Monde).
Si l’on considère que plusieurs des services que peuvent offrir Burkina Sat1 (surveiller l’environnement, les catastrophes, les ressources naturelles…) peuvent être actuellement disponibles gratuitement avec les données satellitaires d’organisations internationales, le coût d’opportunité semble plus important.

Toutefois, ces services sont d’une importance indéniable pour l’économie Burkinabé. Ils touchent principalement des secteurs clés de l’économie. Les données satellitaires permettront d’atténuer les catastrophes, de mieux contrôler les effets du changement climatique et donc de booster la production agricole qui contribue déjà à 24% du PIB et emploie près de 80% de la population active. Burkina Sat1 pourrait accélérer le boom minier à travers l’exploration des ressources naturelles. Burkina Sat1 sera potentiellement un moteur pour l’industrialisation à travers l’innovation ou le progrès technologique. Burkina Sat1 ouvrira de nombreuses opportunités économiques avec le temps et même à travers le volet sécuritaire. Le projet est par ailleurs particulièrement opportun, car il permettra de mieux tirer des avantages économiques en tenant compte du contexte du pays. Il permettra à cet effet de collecter des données spécifiques et utiles. Les données d’organismes internationaux peuvent être assez vagues.
Il y a donc véritablement une raison économique pour le Burkina Faso de s’engager dans la bataille de l’espace. L’espace est devenu plus que jamais un lieu de concurrence économique.

Florent Maré
Économiste, Attaché d’Enseignement et de Recherche
Laboratoire d’Analyse Quantitative Appliquée au Développement-Sahel (LAQAD’S)
UFR Sciences Économiques et de Gestion
Université Ouaga II
Kaceto.net