A la faveur d’une conférence de presse qu’elle a animée le 27 juillet 2022, l’Unité d’action syndicale (UAS) s’est livrée à une critique sans concession de la conduite des affaires publiques par le président Damiba et son gouvernement. Elle a ainsi dénoncé la "revalorisation indécente des salaires du président du Faso, du premier ministre, des présidents d’institutions et des membres du gouvernement, la militarisation de l’administration publique, les menaces et intimidations de citoyens, velléités de remise en cause des libertés démocratiques et des acquis de l’insurrection populaire d’octobre 2014",etc. L’UAS invite par ailleurs "les travailleurs et l’ensemble de la population à la cohésion et à la mobilisation en vue d’une unité d’actions".

Avant d’aborder l’objet de la conférence de presse, l’UAS réaffirme son soutien aux Forces de Défense et de Sécurité (FDS), aux Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP) de même qu’aux vaillantes populations du Burkina Faso qui se battent contre les forces du mal qui nous envahissent. Elle souhaite prompt rétablissement aux blessés et beaucoup de courage aux millions de Personnes Déplacées Internes (PDI) engendrés par cette guerre. L’UAS présente ses condoléances aux familles des victimes civiles, militaires et paramilitaires tombées sous les balles assassines des forces du mal dans cette lutte pour la défense de la patrie. En leur mémoire, je vous demande d’observer une minute de silence.
Merci.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Depuis le 24 janvier 2022, notre pays, le Burkina Faso vit une situation d’Etat
d’exception de fait. Prenant prétexte de la dégradation de la situation sécuritaire à l’époque, le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo DAMIBA, à la tête d’un groupe de militaires se réclamant du Mouvement Patriotique pour la Sauvegarde et la Restauration (MPSR), a perpétré un coup d’Etat qui a mis fin au pouvoir de Roch Marc Christian KABORE. Il s’est taillé un gouvernement, une parure de régime démocratique avec notamment une prestation de serment et une Assemblée Législative de Transition. Cette dernière ne s’est pas fait prier pour lui accorder, presque à l’unanimité, une loi d’habilitation qui l’autorise à prendre des ordonnances dans le cadre des sujétions liées aux nécessités de la défense nationale.
Six mois après le putsch, le Burkina Faso est davantage meurtri et le constat est sans ambages :
⮚de nombreuses pertes en vies humaines avec notamment des tueries en masse (Seytenga, Bourasso, …) ;
⮚la situation sécuritaire s’est détériorée considérablement : près de la moitié du territoire national est hors de contrôle, avec des terroristes qui mettent tout en œuvre pour isoler les grandes villes. Nous assistons au contrôle par ces derniers de certains axes routiers et la destruction d’infrastructures vitales ;
⮚l’accroissement continu du nombre de PDI : aujourd’hui, plus de deux millions de PDI sont confrontées à des conditions de vie inhumaines et dégradantes ;
⮚le renchérissement continu des prix des différents produits plonge un bon nombre de burkinabè dans le désarroi avec des prix qui augmentent sans cesse : dans la sous-région ouest africaine, le Burkina Faso connaît le taux d’inflation le plus élevé. Celle-ci atteint 15 à 20%.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Incapables d’opposer aux groupes terroristes une réaction à la hauteur des attentes des populations et promise par eux à leur prise du pouvoir, le MPSR et son gouvernement se révèlent au peuple burkinabè à travers entre autres :
⮚la revalorisation indécente des salaires du Président du Faso, du Premier Ministre, des présidents d’institutions et des membres du gouvernement sous le prétexte de l’inflation ;
⮚la militarisation de l’administration publique avec la nomination de militaires à des postes de responsabilité administrative, souvent en violation du principe d’appel à candidature pour la nomination des DG des Sociétés d’Etat et des Etablissements Publics de l’Etat. En quoi cette pratique est-elle différente de la politisation de l’administration que le gouvernement prétend combattre ?
⮚le maintien des accords de coopération asservissants avec la France ;
⮚des mesures annoncées au niveau des zones à haut déficit sécuritaire dont la pertinence et l’efficacité peuvent être mises en doute au regard de l’expérience de l’application de ces mesures dans certaines régions (couvre-feu, interdiction de circulation de certains engins, …). Le doute est d’autant fondé que le gouvernement n’a pas annoncé de mesures d’accompagnement, particulièrement en ce qui concerne les zones d’intérêt militaire ;
⮚des menaces et intimidations de citoyens qui ne font qu’exprimer leurs légitimes inquiétudes face à l’aggravation de la situation sécuritaire ;
⮚des
velléités de remise en cause des libertés démocratiques et des acquis de l’insurrection populaire d’octobre 2014 ;
⮚une prime à l’impunité en faisant venir l’ancien président Blaise COMPAORE en dépit du fait que ce dernier est sous le coup d’une condamnation judiciaire et d’un mandat d’arrêt international sous prétexte de « réconciliation nationale » : A noter que par ce fait, le chef de l’Etat a violé le serment, prêté comme Président du Faso, par lequel il a juré de respecter la Constitution et de garantir la justice à tous les Burkinabè. Cette velléité de soustraire Blaise COMPAORE de la justice achève de convaincre les plus sceptiques sur les motivations et les plans réels du MPSR à savoir la restauration de l’ancien régime COMPAORE.

Mesdames et messieurs les journalistes,

En plus de tous ces faits précédemment évoqués, l’Unité d’Action Syndicale note des tentatives de remise en cause des acquis des travailleurs et un manque de considération à l’endroit des organisations syndicales, particulièrement du partenaire social qu’est l’UAS. Et pourtant en rencontrant l’UAS le 27 janvier 2022, le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo DAMIBA avait promis que les préoccupations des organisations syndicales seraient étudiées et qu’elles seraient impliquées à travers notamment des concertations. En violation de ces engagements, les syndicats, qui sont pourtant membres du cadre de concertation tripartite, ont été délibérément exclus des rencontres sur la fixation des prix des produits de grande consommation. Tout le monde fait le constat qu’en l’absence de mesures d’accompagnement, les prix décidés et annoncés ne sont nullement respectés. A deux reprises, l’UAS a demandé une audience avec le Premier Ministre Albert OUEDRAOGO. La première date du 25 mai 2022 et est relative à l’inflation galopante ; la seconde datée du 8 juillet 2022 porte sur les préoccupations du moment. Ces deux demandes d’audience sont restées sans suite jusqu’à ce jour.
L’UAS rappelle qu’à l’avènement du MPSR, celui-ci l’avait invitée à accompagner le gouvernement et à faire des propositions pour la transition. Nous avions poliment décliné l’offre en indiquant que nous nous en tenions à notre mission de défense des intérêts matériels et moraux des travailleurs mais aussi de veille citoyenne. A l’occasion, nous avions souligné que nos préoccupations essentielles étaient relatives à la sécurité des populations et de leurs biens, à l’assainissement de la gestion des ressources nationales, au respect des libertés démocratiques, au respect des engagements pris avec les organisations syndicales et à la garantie du pouvoir d’achat.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Le Gouvernement a annoncé dernièrement qu’il allait procéder au remboursement des retenues illégalement opérées sur les salaires et traitements des agents publics suite aux grèves de 2016 à 2021. Tout en saluant cette initiative, nous relevons que ce n’est que justice, d’autant que certains cas sont pendants devant la justice et que les premiers délibérés ordonnent le remboursement desdits salaires coupés et le paiement de dommages et intérêts. A l’opposé de ces mesures, censées contribuer à apaiser le climat social, nous notons que le gouvernement envisage des mesures qui vont remettre en cause les acquis des travailleurs. Sont de celles-là, la suspension (déjà effective) du paiement des indemnités aux agents dont les prises de service sont retardées par l’administration, le projet d’harmonisation des primes servies aux travailleurs des Sociétés d’Etat et des Etablissements Publics de Prévoyance Sociale, les velléités de remise en cause des voyages d’étude et des primes de recherche des enseignants chercheurs et des chercheurs, la mise en œuvre des mesures préconisées par la conférence sur la réforme du système de rémunération, etc.
Dans le contexte actuel d’insécurité et de renchérissement continu du coût de la vie, il n’est pas indiqué de chercher à réduire le maigre pouvoir d’achat des travailleurs et des populations, surtout quand, dès sa mise en place, le gouvernement a pris le soin de doubler les salaires du Président du Faso, du Premier Ministre, des présidents d’institutions et des membres du gouvernement.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Au regard de tout ce qui précède, l’UAS interpelle encore une fois le gouvernement sur l’impérieuse nécessité d’apporter des solutions adéquates aux préoccupations du peuple dont principalement la restauration de l’intégrité du territoire national et la baisse des prix des produits de consommation courante. Le MPSR doit comprendre qu’il s’agit là de deux attentes fortes des populations qui justifient qu’elles aient tout simplement toléré le putsch du 24 janvier 2022 et rien d’autre.
Nous sommes à un tournent décisif de l’histoire du Burkina Faso. Face à la dégradation jamais égalée de la situation sécuritaire, l’UAS invite les travailleurs et l’ensemble de la population à la cohésion et à la mobilisation en vue d’une unité d’actions. Elle réitère l’invitation faite, à travers sa déclaration du 25 mai 2022 aux militantes, militants, travailleuses et travailleurs de « renforcer leurs structures et à se mobiliser pour les actions qui s’imposent à nous en vue de la prise en compte des préoccupations ci-dessus énumérées » dans la perspective d’une réaction à la hauteur des défis qui se posent aujourd’hui à notre peuple. Cela passe par la tenue d’assemblées générales dans les sections, sous-sections et lieux de travail.

Mesdames et messieurs les journalistes,

Au nom des Secrétaires Généraux de l’Unité d’Action Syndicale, composée de 6 centrales syndicales et de 17 syndicats autonomes, je vous remercie de votre attention. Nous sommes à présent à votre disposition pour la suite de la conférence de presse.
Ouagadougou, le 27 juillet 2022

Pour l’UAS,
Le Porte-parole
Olivier Guy OUEDRAOGO
Secrétaire Général / CSB


UNITE D’ACTION SYNDICALE (UAS) / BURKINA FASO
LES CENTRALES SYNDICALES :
CGT-B – CNTB – CSB – FO/UNS – ONSL – USTB
LES SYNDICATS AUTONOMES :
SAMAE–SATB–SATEB–SBM–SNEAB–SNESS–SYNAPAGER–SYNAPIB–SYNATEB–SYNATEL–SYNATIC–SYNATIPB–SYNATRAD–SYNTAS–SYNTRAPOST–SYSFMAB–UGMB