Une fois encore, le « Pays des hommes intègres » se retrouve en phase finale de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) de football. Il faut rappeler ici que ce pays d’Afrique de l’ouest est à sa 11ème participation à la CAN et sa cinquième fois consécutivement. On se souvient que le Burkina Faso est allé en demi-finale en 1998 lorsqu’il organisa lui-même la compétition, un bon résultat qui a été d’ailleurs confirmé par sa qualification en finale en 2013 en Afrique du Sud où il a failli de peu, ramener le trophée à Ouagadougou . Ce palmarès est plutôt à l’honneur des Etalons. Pas à pas, d’année en année, d’édition en édition, notre pays a conquis sa place parmi les nations africaines de football. Cette performance sportive est, au fond, sans rapport avec celle que l’économie laisse voir dans la compétition africaine. En football, le Burkina Faso défie les puissances économiques africaines qui sont alors obligées de lui accorder tout respect, ne serait-ce que le temps d’un match. Les hommes du Faso devraient peut être fiers des miracles de leur équipe nationale en football, qui sont sans lien avec les résultats que leur pays a pu atteindre dans les domaines dit socio-économiques. Ce miracle n’est cependant pas tombé du ciel.
Le Burkina Faso, une terre amoureuse du Football

Bien sûr, le football, dans moult pays, occupe cette noble place de sport roi. Le Burkina Faso ne fait pas exception. Ou du moins, il fait exception, parce que là, le football, comme dans beaucoup de pays non nantis de la périphérie du monde, est plus peuple que roi. Il est le sport le plus accessible à toutes les couches sociales et le plus adaptable à tous les milieux. Le football se joue en prison, dans la rue, à l’école, dans les villes comme dans les campagnes les plus reculées et les plus isolées. De Madouba, dans la province de la Kossi, à Namounou dans la Tapoa , de Niangologo à la frontière ivoirienne, à Dori à la lisière du Sahara, de Gaoua au sud-ouest à Gourcy au nord, la jeunesse burkinabé aime le foot et joue au foot, bien souvent avec un ballon de fortune, fait de chiffons enrobés, sur un terrain de saison sèche conquis sur un champs d’hivernage, au son du goumbé, du balafon, du tam-tam, du bendré et des flûtes doulyaro du sahel. On peut alors aisément comprendre que les Burkinabé, trouvent l’audace de défier les grands du football, de figurer parmi les géants, nonobstant, de temps à autres, des sorties ratées liés aux aléas de la préparation technique des l’Etalons.
Indubitablement, le football, au Faso, est devenu un facteur de mobilisation et d’unité nationale. Il nous unis d’autant plus que nous avons un défi national à relever : ramener la coupe d’Afrique des nations à Ouagadougou, au bord du Kadiogo sacré. Quel est le Burkinabé qui ne rêve pas de cela ! Ce défi est là, transcendant les clivages politiques, les différences socioculturelles, les inégalités de conditions et de situations économiques. Les Burkinabé veulent toucher la coupe d’Afrique des nations, un point un trait. Ce sera à cette édition ou à une autre, peu importe ; le trophée séjournera très bientôt au Faso. Et qui ne souhaite pas d’ailleurs que ce soit à cette édition ? Là réside notre défi national qui doit nous amener à parler d’une même voix, à danser foot au son d’une même musique. A clamer tous : étalons, étalons, le Faso veut la coupe ! Étalons, étalons, tout un peuple est derrière vous !

Dans tous les cas, pour un mois, le Faso vivra dans l’enthousiasme de cette coupe d’Afrique des nations. Le défi nous unira jusqu’au bout. Le plaisir du beau jeu à la burkinabé mettra nos cœurs à l’unisson et occultera nos divergences sur d’autres sujets d’intérêt national. Quelqu’un a dit : « votre enthousiasme pour le foot est un enthousiasme éphémère, et vous vous réveillerez douloureusement, d’ici un mois, avec votre place de pays chroniquement pauvre parmi les pays les plus chroniquement pauvres du monde ». Là n’est pas le problème monsieur ! Ce n’est pas une coupe d’Afrique qui sortira le Faso de ces problèmes ; nous le savons, nous aussi. Mais, monsieur, notre enthousiasme, éphémère soit-il, est pour nous un bel exercice d’union des cœurs. Et Dieu sait que, nous burkinabé, nous avons besoin d’apprendre à nous unir pour relever de multiples défis, autres que celui du sport roi.

Zassi Goro,
Professeur de Lettres et philosophie, écrivain.