C’est sous le thème « Soutenez. Ne punissez pas » que la société civile de la région des Hauts Bassins a célébré lors d’une rencontre hier, la journée internationale de la lutte contre la drogue instituée chaque 26 juin par les Nations Unies. Co-organisée par la Maison des associations de lutte contre le Sida (MAS) et le Projet droits humains de l’ONG REVS+, la rencontre d’échanges et d’informations sur la problématique de la drogue a réuni les autorités de la région, au premier desquelles, le Secrétaire général, les Forces de défense et de sécurité, les associations de jeunesse et la presse.

Au cours de la rencontre qui inaugurait soixante douze heures d’activités de plaidoyer et de sensibilisation dans la ville de Bobo-Dioulasso, les participants ont planché sur le thème ci-dessus et déroulé le rapport 2013 de la Commission ouest-africaine sur les drogues (WACD). Laquelle avait recommandé entre autres, de poursuivre la décriminalisation de l’usage de drogues et des infractions mineures, et lutter contre les effets de la drogue à travers le financement de la prévention, le traitement et la réduction des risques. Leaders dans la lutte contre le VIH dans la région, les associations MAS et REVS+ entendent accentuer le combat contre l’abus des drogues illicites qui est devenu un vrai problème de jeunesse au même titre que le VIH/Sida. Ces deux phénomènes sont liés et il est illusoire d’espérer arriver à bout du VIH/Sida si des actions vigoureuses ne sont pas entreprises dans le même temps pour protéger la jeunesse de l’abus des drogues. Le secrétaire permanent de la commission nationale de lutte contre la drogue (SP/CNLD), Diallo Mariam/Zoromé, l’a dit sans détour, lorsqu’elle affirme que la drogue a désormais élu cité dans nos établissements scolaires et universitaires. Elle appelle vivement tous les acteurs, notamment la société civile, à initier des actions de sensibilisation dans les établissements scolaires et invite les parents à ne plus considérer la consommation des drogues par les enfants comme une honte, mais comme une maladie pour laquelle ils doivent demander de l’aide.

Il ne s’agit plus de criminaliser les consommateurs de drogues, mais de les aider par tous les moyens à les sortir de la dépendance dans laquelle les drogues les conduisent. Selon Koffi Annan, créateur de l’institut ouest-africain contre la drogue que dirige l’ancien président Nigérian Olesegun Obasanjo, par ailleurs président de la Commission ouest africaine sur les drogues, « les mauvaises politiques tuent plus que l’abus des drogues ». Autrement dit, les politiques de lutte contre la drogue jusque là basées sur le tout répressif manquent d’efficacité. Ce sont toujours les petits dealers et consommateurs qui peuplent nos prisons, pendant que les barons et autres criminels du trafic de la drogue continuent leur sale besogne en toute impunité. En 2011, un avion venant d’Amérique latine avec plus de six tonnes de cocaïne a atterri dans le désert malien, y a déchargé sa cargaison sans que personne n’ait été arrêtée. Un exemple qui est loin d’être isolé dans la sous région-ouest africaine, nos forces de défense et de sécurité manquant de moyens adéquats pour traquer les vrais criminels. La cartographie de la consommation de la drogue, établie par les forces de défense et de sécurité des Hauts Bassins donne des indications claires sur le circuit de distribution. Essentiellement constituée de cannabis, la drogue transite dans les villages connus pour l’orpaillage comme Karangasso Vigué. Des trafiquants ont été appréhendés à Bama, Péni et Toussiana. Les sites de consommation dans la ville de Bobo se concentrent dans les quartiers où le travail de sexe est légion comme Bolmakoté et Koko. Le combat contre la consommation de la drogue s’annonce long et délicat d’autant que les structures de prévention et de prise en charge manquent cruellement dans nos pays. « Il faut des compétences tant au niveau des associations qu’au sein du système de santé pour prévenir l’usage des drogues et soutenir les consommateurs », explique le docteur Siranyan, médecin psychiatre, spécialiste de l’enfant et de l’adolescent au CHU Souro Sanou.

Le temps urge, car chaque jour qui passe, la drogue continue de faire des ravages dans nos établissements scolaires, nos quartiers et villages. Elle décime les populations vulnérables que sont les travailleuses de sexe, et il faut le dire, nos artistes qui portent haut notre culture dans le monde. Présidente de MAS, Christine Kafando, est également membre de la Commission ouest africaine sur les drogues dans laquelle siègent aussi l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo et l’ancien premier ministre togolais, actuel médiateur en RDC, Edem Kodjo.

Wendebenedo Zanguin , Bobo-Dioulasso
Kaceto.net