Ils sont 14 accusés dont le PDG de Will Télécom, à être poursuivis pour des faits de complicité d’escroquerie et de falsification de documents informatiques. Des virements fictifs auraient été effectués sur leurs comptes bancaires à la banque CBEAO et les accusés en auraient usé. Voici le décor d’un procès marathon qui a réuni du monde au palais de justice de Ouagadougou hier jeudi de 8 h du matin à vendredi 1h du matin, soit 17heures de procès.

Le procès a débuté à 9h précises et à consisté à l’interrogatoire du seul témoin du jour. Mme Gnoula Yvette, cadre au siège de la banque CBEAO, au Burkina a été cuisinée littéralement par les avocats pendant trois heures de temps. En veste noire sur une robe bleue, elle est restée sereine et imperturbable face aux questions parfois répétées par plusieurs avocats.
Quelle est l’origine des manipulations de compte ?
Personnellement je n’en connais pas l’origine, répond Mme Gnoula.
Est-ce que ça peut venir des agents de la Banque ? un guichetier, un conseiller ou même le Directeur ?
À notre niveau, je ne pense pas qu’on peut le faire, répond toujours sereine Yvette Gnoula.
Et le service informatique ? Ils ne peuvent pas manipuler les comptes ?

Non. Ils peuvent juste consulter, affirme catégorique, Mme Gnoula.
Les avocats de la défense tenteront de faire admettre à Mme Gnoula que s’il y a eu des manipulations et des fraudes quelquonques, elles ne peuvent venir que du sein de la banque elle-même.

Les avocats, Me Christophe Birba, Me Paré, Me Antoinette Ouedraogo entre autres vont fustiger les agissements de la Banque et indexer plutôt leur niveau de sécurité informatique. L’accès notamment aux serveurs informatiques de la banque qui se trouvent à Dakar au Sénégal, siège de la CBEAO est la clé des manipulations de compte selon les avocats.

Me Christophe Birba va aussi citer un communiqué du siège de la CBEAO qui reconnaît des cas de malversations d’un agent au sein de la Banque. Il estime que les accusés sont des victimes également, notamment le plus célèbre, Sayouba Zidwemba, le PDG de Will Télécom qui aurait reçu l’argent dans son compte, en contrepartie d’une vente de matériels informatiques.

Les avocats de la banque CBEAO, notamment Me Farama va contredire cela en estimant que le PDG de Will Télécom a produit de fausses factures pour justifier les faits à posteriori. Il demandera à ce que le tribunal condamne les accusés à rembourser la somme de plus de 218 millions de francs CFA, dont 67 millions par le PDG de Will Télécom.

Me Farama demande aussi le paiement de 250 millions de francs CFA à titre de dommages et intérêts et de préjudice subit par la banque qui s’est vue faire une mauvaise publicité ; et pour finir, Me Farama a demandé au tribunal de condamner les accusés à payer la somme de 10 millions de francs CFA pour les frais engagés pour le procès. Soit une demande d’environ 470 millions de francs CFA.

Le procureur comme il fallait s’y attendre, embouchera la même trompette que Me Farama. Il va charger les 14 accusés en les traitant tous de menteurs. Certains disent avoir reçu l’argent d’un client pour acheter du sésame jusqu’à hauteur de 50 millions, un autre dit avoir reçu l’argent pour un achat d’or, d’aucuns affirment avoir juste voulu rendre service à des amis en les laissant faire des virements sur leurs comptes. Le procureur va s’atteler tout au long de sa plaidoirie a démontrer que se sont des mensonges et va naturellement demander aux juges de les condamner tous sans exception à 05 années de prison chacun.
Qu’est-ce qu’ils ont fait pour mériter d’être condamnés à 05 ans ? S’interroge Me Birba.
Les avocats de la défense dans de très longues plaidoiries, vont interpeller les juges sur le fait, selon eux, qu’il n’y a aucune preuve que les accusés en communiquant leurs numéros de compte à des tiers, savaient que c’était pour des actes répréhensibles.

Ils estiment donc que les accusés devraient être purement et simplement relaxés parce-qu’il n’y aurait aucune preuve de leur intention de participer à des malversations.

Le président du tribunal a pour sa part demandé aux avocats d’aller à l’essentiel parce-qu’il tenait à finir avec ce dossier ce 29 juin. Il explique cet empressement par le fait que sa cour changerait de membres à cause des vacances judiciaires. Mais les avocats prendront leur temps quitte à répéter parfois les mêmes arguments. Les plaidoiries vont se poursuivre jusqu’à 01h du matin ce vendredi 30 juin. Le dossier est mis en délibéré pour un verdict le 29 juillet 2017.

Hermann Wenkouni Nazé
Kaceto.net