Ceci est un droit de réponse de Yves Milogo adressé au Professeur Gérard Segda qui avait réagi à sa tribune sur le retour ou pas de Eddie Komboïgo à la présidence du CDP, après que la justice l’ait innocenté dans le dossier du coup d’Etat de septembre 2015.

Je félicite le Professeur, camarade et frère Gérard Segda pour son écrit paru dans le journal en ligne KACETO.NET le 08 février 2018 sous le titre : « Présidence du CDP : Eddie Komboïgo ne devait pas se présenter à la présidentielle de 2015 »
Dans cette tribune, le Professeur Gérard Segda m’interpelle personnellement par rapport à mon écrit intitulé, « La guerre de Troie aura-elle lieu(…) ? » paru le dans l’édition numéro 6518 du journal Le Pays en date du 29 janvier 2018 et dans Kaceto.net sous le tire, « RÉTABLIR LA PRÉSIDENCE LÉGALE POUR LA RECONSTRUCTION DU CDP DEVIENT UNE (...) » en date du 30 janvier 2018. Il dit explicitement : « Le camarade Yves MILOGO ancien secrétaire général de la section France du CDP est un grand cadre du parti, mais j’ai l’impression que, loin du Faso, il n’appréhende pas complètement ( l) les réalités du terrain politique du pays. Ou alors s’il les connaît, il ne donne pas une vraie lecture de la situation avec le sens de la rigueur et de la vérité qu’on lui reconnait habituellement. Il est possible également que sa bonne foi ait été abusée. Yves MILOGO est un grand militant que je respecte beaucoup et c’est en cela que sa position m’étonne énormément. D’abord dans quelles circonstances Eddie KOMBOIGO a-t-il accédé à la présidence de notre parti et comment cela a-t-il été possible alors même qu’on ne lui connaissait aucun passé politique significatif et que sa seule notoriété se limitait au monde des affaires ? »
Puisque je suis interpellé à titre individuel, je m’en vais exercer mon droit de réponse. En effet, dans mon écrit dont fait allusion le Professeur Gérard Segda, je défends trois exigences nécessaires au bon fonctionnement de tout parti en général, et du CDP en particulier.
  Le nécessaire aggiornamento du CDP, c’est-à-dire sa mise en phase avec son temps.
  La légalité comme principe de gestion et de décision.
  La démocratie comme exigence d’un principe de fonctionnement et de cohérence républicaine.
Ces exigences, n’importe quel parti dans un Etat de droit peut se les approprier. Autrement dit, il s’agit d’un écrit avec une démarche débarrassée de tout subjectivisme et de toute personnalisation du débat en ce sens que je prends de la distance par rapport à l’objet d’analyse comme précaution d’usage. C’est en cela que je m’étonne des propos subjectifs et personnalisant du Professeur Gérard Segda.
Que viennent faire le nom et le parcours politique de Monsieur Eddie Komboïgo dans la réponse du Professeur Gérard Segda par rapport à mon écrit qui insiste sur des principes de gestion d’un parti ? Si le Professeur Gérard Segda a des observations à faire à l’endroit Monsieur Eddie Komboïgo, ce qui est de son droit, je lui suggère une autre démarche plus adaptée, plus professionnelle, plus politiquement correcte, plus militante (de manière intrépide) et plus efficace. Mais concernant les parcours des individus, Pierre Corneille dans le Cid donne une bonne explication à travers les propos de Rodrigue.
L’écrit du Professeur illustre parfaitement ce que je dénonce dans le fonctionnement d’un parti républicain puisqu’il dit précisément : « Ce sont les anciens députés de la cinquième mandature (restés fidèles au CDP) qui ont porté et soutenu sa candidature à la présidence du parti. Ils l’ont fait avec l’idée que le choix d’Eddie KOMBOIGO répondait aux nécessités du moment, quand bien même cette désignation n’obéissait pas aux règles et aux principes de fonctionnement du parti »

Comment peut-il en tant que cadre d’un parti, décrire de tels comportements illustrateurs d’une violation flagrante des propres textes du parti ? Autrement dit, ces députés auraient fabriqué le président du CDP en dehors de tout cadre légal et au détriment d’une démarche démocratique ?
Je suis d’autant plus surpris que je vais aussi surprendre le Professeur en précisant qu’un militant sans être intrépide mais politique, n’est jamais assez loin géographiquement de son champ d’opération comme il prétend le dire à mon égard. J’ai la parfaite connaissance des différentes tractations avant le Congrès de mai 2015 entre plusieurs prétendants à la présidence du parti. C’est par absence, désistements de certains et consensus des autres que la candidature de Eddie Komboïgo a été cooptée par les différentes tendances pour être proposée au Congrès. Ce n’est donc pas l’œuvre singulière d’un groupe de députés se réunissant dans un immeuble privé à quelques pas du siège aux bons soins d’un bon samaritain. J’ai également connaissance qu’un certain camarade a fait un tour à la NAFA avant de rebrousser chemin. De même auparavant, sachant ses chances sont maigres d’être élu député dans sa province, il s’était fait inscrire sur la liste nationale et avait torpillé le candidat officiel du CDP dans cette même province. Des observations ou des remarques désobligeantes avaient-elles été faites en ce moment à ce camarade ? Sans avoir été personnellement dans une telle posture, je prends de la distance et de la hauteur pour dire que les hésitations, les doutes, et les erreurs sont humaines. Les reconnaitre, les corriger pour aller de l’avant correspond à une démarche noble. Ma position dans cette situation conflictuelle à la direction du CDP reste celle de la légalité et le respect du principe démocratique en toute circonstance. Mais si d’aventure, il existait un vide juridique, la sagesse serait de faire appel au bon sens et au consensus. Ce qui n’est pas le cas de l’espèce.
Je suis également interpellé sur sept (7) points suivants :
« Concernant la vie du parti depuis 2015, j’invite notre camarade Yves MILOGO à se poser certaines questions et à en chercher les réponses. Ces questions qui méritent d’être posées et que notre camarade MILOGO ne pose pas sont :
1) Pourquoi le Bureau politique du parti a-t-il décidé de confier la présidence du parti à un intérimaire depuis 2015 ? Pourquoi cet intérim a-t-il été prorogé par le Bureau politique le 30 septembre 2017 ?
2) Combien de camarades étaient dans la même situation même pire qu’Eddie KOMBOIGO ? Ont-ils oui ou non repris leurs places dans la direction du parti et pourquoi pas Eddie ?
3) Pourquoi lui seul a été disculpé dans un premier temps, suivi après par d’autres camarades ? Quelle manœuvre politique cache cette complaisance sélective d’une justice que nous savons instrumentalisée ?
4) Lorsqu’on examine les cas des grands leaders des partis politiques emprisonnés au Burkina ou à travers le monde, ont-ils eu le même comportement qu’Eddie KOMBOIGO ?
5) Est-il responsable et même décent de la part du dirigeant d’un parti d’organiser une succession de manifestations festives pour célébrer son élargissement alors même d’autres militants du parti sont poursuivis pour les mêmes faits politiques, ou pour des causes connexes ?Est-il décent de féliciter la justice d’exception qui est à l’œuvre dans notre pays, alors que les partis de l’opposition républicaine, de nombreuses organisations de la société civile et même certains anciens activistes de l’insurrection s’emploient à en demander la suppression ?
6) Eddie KOMBOIGO poursuit-il l’agenda de soumettre la vie du CDP à son rêve de devenir Président du Faso, au prix de toutes les compromissions et quitte à détruire ou à affaiblir notre parti ?
7) Le comportement qu’il a montré depuis sa nomination en 2015 et singulièrement depuis qu’il bénéficié d’un non-lieu relève-t-il de la maturité politique, du courage, de l’esprit de responsabilité, de l’humilité qu’exigent les fonctions de président d’un grand parti ? Ne démontre-t-il pas exactement l’inverse de ces qualités, jusqu’à la caricature ?
Bien de questions qu’on ne finira pas de se poser »

Sur ces questions je m’en vais être responsable, digne et claire. Je ne vais pas « boxer en dessous de la ceinture ». Premièrement sur la question de l’intérim, que prévoient les statuts et le règlement intérieur du CDP qui invitent à une telle décision et à de tels comportements de la part des intérimaires et de la commission ad hoc ? Lorsque la vacance de la présidence ou de n’importe quel poste est constaté, que disent les textes, notamment l’article 38 ? Qu’est-ce qui s’est passé pour que l’article 47 ne soit pas activité jusqu’à maintenant concernant le contrôle de la conformité des actes des organes par rapport aux textes ? Comment une commission ad hoc, c’est-à-dire un organe de travail peut-il se prévaloir des prérogatives de la direction du parti alors qu’elle est supposée être temporelle ? S’il y a eu un manquement dans l’application des textes en termes de droit, cela ne constitue pas une fierté et encore moins une habitude à encourager. Devons-nous cependant comprendre que délibérément, des responsables ont orienté le bureau politique à mettre en place un système intérimaire et une commission ad hoc au mépris des textes pour parasiter le fonctionnement légal du parti ? Si oui, à quels desseins ?
Deuxièmement, concernant les attaques personnelles dans l’écrit du Professeur, je ne suis pas compétent dans une telle démarche, et dans ce domaine, j’y avoue mes limites. A travers mon observation, j’écrits sur des faits que j’analyse. Au terme de mes analyses, je prends et défends des positions de principes valables pour Y et X sans intention partisane. Par contre, l’écrit du Professeur m’éclaire plus sur une démarche apparemment habituelle, sur les intentions de cette démarche et sur les résultats escomptés en termes d’agenda. Car il semble soutenir que le système intérimaire et la commission ad hoc ont la légalité et la légitimité de conduire la gestion du parti jusqu’au prochain congrès sans avoir l’obligation de rétablir la présidence instituée par le précédent Congrès.
  Cela devient inquiétant et je m’interroge sur le sens des allégations et réquisitoires du Professeur contre un ou des camarades.
  Cela devient autant plus inquiétant que je m’interroge sur la sincérité de la démarche des dispositifs intérimaires ou ad hoc et leur capacité à reconstruire véritablement le CDP.
  Cela devient encore plus inquiétant que le schéma qui consiste à aller à un congrès sans le respect de la légalité, correspond plus à un « coup d’Etat » qu’à une facilitation de réorganisation du CDP pour une future conquête du pouvoir.
En effet, comment dois-je comprendre votre démarche qui consiste :
  Premièrement, à poser comme préalable la tenue d’un congrès ordinaire convoqué par les intérimaires et la commission ad hoc, ce qui nécessite la mise en place d’une commission d’organisation par ces mêmes instances ?
  Deuxièmement, à parler de la question légale pour le rétablissement de la présidence normale. Autrement dit, un président serait rétabli dans ses droits avec un congrès organisé sans lui et qui n’a pas été initié par ses schèmes de pensées ni par ses schèmes d’actions ou par son équipe. Comment peut-il cautionner le bilan qui y sera produit ? Comment doit-il appréhender et soutenir les perspectives du futur pour le parti ? Là encore cher Professeur, votre démarche va en contradiction avec un des principes qui m’est très cher : la liberté (de penser, d’expression…).
Cher professeur, je m’en vais vous décevoir car la science politique que j’enseigne aux étudiants m’interdit d’accepter cette manipulation, la méthodologie que j’enseigne aux étudiants m’interdit de cautionner une telle démarche, le management, la finance et la prospective stratégique et industrielle auxquelles je forme des décideurs de demain m’interdisent de prendre vos somnifères. Mon combat qui a débuté bien avant le CDP au collège puis à l’université dans les cellules de l’Union des communistes burkinabè (UCB), est celui qui consiste à repousser toujours plus loin les frontières de l’ignorance et de l’intolérance et à œuvrer pour plus de liberté, plus de solidarité pour un progrès social. Mais pour y arriver, chaque citoyen, chaque responsable politique et surtout moi-même, doit œuvrer à l’affermissement de la démocratie, au respect de la légalité, ciment de notre savoir-vivre ensemble pour construire un Faso développé, prospère et sécurisé.
A vous cher Professeur, cher camarade et militant intrépide, ma fraternelle considération.

Yves A. MILLOGO
Un militant
Kaceto.net