Quelle est l’instance habilitée à convoquer le congrès ordinaire du Congrès pour la démocratie et le progrès ? Le bureau politique ? Le président par intérim et le président de la commission ad’hoc ?
La question n’est pas anodine dans le contexte actuel marqué par une guerre pour le contrôle de la direction de l’ex parti au pouvoir.
Dans la Tribune ci-contre, Yves Millogo, un des principaux animateurs du débat interne au CDP depuis quelques semaines, s’exprime sur le sujet.

Des écrits et des débats ont défrayé la chronique concernant ce qui a été qualifié de crise au CDP, ou plus exactement, la guerre pour la direction du parti. Dans ces écrits et ces débats, la notion de légalité ou de rétablissement de la présidence légale a souvent été soulignée. Les textes fondateurs du parti y sont évoqués par les parties sans pour autant savoir ce que disent réellement ces textes. C’est la raison pour laquelle, il parait utile de relever leur contenu en ce qui concerne la présidence et les instances de décision, et de montrer en quoi la situation actuelle y trouve ses éléments de résolution ou de sortie de crise.
Dans le contexte précis, ce sont les Titre III et IV des statuts et règlement intérieur du CDP, modifié, par le VIè Congrès ordinaire tenu à Ouagadougou les 09 et 10 mai 2015 concernant respectivement l’organisation et l’administration, et les instances nationales du parti qui sont utiles à son appréciation.
En effet, le Titre III traite de l’organisation et de l’administration du parti. En son chapitre premier, les structures, les instances et les organes y sont définis. Mais il convient de préciser ces notions indépendamment les unes des autres pour éviter la confusion des genres et des rôles qui ont souvent été la source de controverses dans les interprétations comme dans la gestion du parti.
Une structure est une organisation stable et durable avec différentes composantes caractéristiques. Une instance est une institution ayant un pouvoir d’autorité, de décision ou de contrôle. Un organe dans le contexte d’un parti constitue un dispositif circonscrit et différencié d’une structure et remplissant une ou plusieurs fonctions spécifiques. En effet, dans chapitre premier, le comité, la sous-section, la section, le conseil politique régional, le bureau politique national, le bureau exécutif national, le secrétariat permanent et le haut conseil constituent en même temps des structures et des organes. Mais dans une configuration d’ensemble, seuls le comité, la sous-section, la section, le conseil politique régional et le bureau politique national sont des instances du parti. De même, les commissions (ch.2 T.III,) les unions (ch.3 T.III,) et les coordinations (ch.4 T.III,) restent des structures spécifiques ou organe du parti sans être des instances en termes de pouvoir, d’autorité ou de décision.
Le débat de l’heure concerne surtout les organes et leurs instances. Car le problème qui se pose est de savoir s’il faut ou non rétablir la présidence légale dans ses fonctions qui par la suite permettra la tenue d’un Congrès. Si ce problème trouve sa solution dans la légalité, il convient de savoir comment procéder concrètement pour un fonctionnement normal du parti ? C’est la raison pour laquelle, il est utile de connaitre les instances de ce parti afin d’y relever les points pouvant éclairer la démarche vers un fonctionnement normal, c’est-à-dire, légal et impersonnel.

De manière statutaire, les instances sont, le Congrès, le Conseil national, la Session du bureau politique et la convention sectorielle.
Le Congrès est l’instance suprême du parti. Les articles 78 à 81 des statuts définissent respectivement sa composition, ses compétences, le caractère de ses décisions et le mode de sa convocation. Ainsi il est précisé en son article 80 : « Les décision du conseil sont exécutoires et ne peuvent être révoquées que par un autre Congrès ». C’est au regard de cet article que les intérimaires et la commission ah hoc ne peuvent pas tronquer la gouvernance du parti en refusant la présidence statutaire, c’es-à-dire légale.
Le Conseil national est l’instance de délibération du parti entre deux (2) Congrès, comme précisé à l’article 82 des statuts. Si sa composition est définie par l’article 83, l’article 84 définit ses compétences en précisant : « Le Conseil National a pour compétence de :
  Evaluer l’exécution des décisions du Congrès
  Examiner les rapports du Bureau politique national
  Donner des orientations en matière de stratégie électorale du parti
  Examiner toute question importante relative à la vie du parti ou d’intérêt national
  Convoquer le Congrès du parti ».
Cet article éclaire et permet de dénouer la situation conflictuelle présente en ce sens que ni les intérimaires et la commission ad hoc, ni le bureau politique ne peuvent convoquer légalement un congrès ordinaire. Ce rôle incombe donc au Conseil national. Cependant l’article 118 des statuts précise que « Le Congrès peut être convoqué en session extraordinaire à l’initiative du Bureau Politique National ou à la demande des 2/3 du Conseil National ».
La Session est l’instance de délibération du Bureau Politique National (art.85). Il est important de noter que le Bureau Politique National est l’organe dirigeant du parti. Il détermine les modalités d’exécution du programme du parti et des décisions du Congrès et du Conseil national.
La Convection sectorielle est une instance consultative du parti convoquée par le Bureau Politique National pour mener des réflexions et des échanges sur des questions politiques, économiques, financières, sociales ou culturelles (art.87).
La légalité dont il est question pour le rétablissement de la présidence statutaire provient de ces instances du parti. Autrement dit, le rétablissement légal de la présidence et la tenue d’un congrès incombe à ses instances. Ce qui montre qu’un système intérimaire ou une commission ad hoc ne peut pas faire fi de ces organes et de leurs prérogatives pour s’accaparer de manière autocratique la présidence du parti. Autrement dit, le rétablissement de la présidence statutaire passe par le fonctionnement et le respect de ses instances afin que le CDP retrouve ses titres de noblesse dans la conquête démocratique du pouvoir en 2020.

ves Millogo
Militant CDP ; Ancien secrétaire général de la section France