Lancée le 8 juillet 2017, l’Union des Soroïstes (UDS) a annoncé lors de son premier conseil national le 8 août dernier, la candidature de Guillaume Soro à la présidnetielle de 2020. On se doute bien que l’anonnce de sa candidature n’a pas été faite sans son consentement, et que le moment venu, il répondra favorablement aux voeux de ses partisans.
En attendant, ses amis, conseillers et soutiens labourent le terrain, au propre comme au figuré, afin de lever les obstacles qui pourraient bloquer son ascension vers la présidence.
C’est la tâche à laquelle s’y colle Mamadou Djibo Baanè-Badikiranè-c’est son nom complet-professeur de philosophie et Conseiller de Guillaume Soro Kigafori depuis 2014, en charge de la problématique des innovations sociales et politiques, de la prospérité partagée et du panafricanisme pragmatique.
Diplômé des Universités de Ouagadougou, de Jules Vernes Picardie, de la Paris-IV Sorbonne et depuis 1996, Docteur en philosophie de l’Université d’Ottawa, option Arithmétique et fondement des mathématiques, il est l’auteur du "Des projets fondationnels de Husserl et de Frege à la perspective de Wittgenstein", publié chez L’Harmattan en 2012.
Auteur de plus 300 articles, il prépare un autre ouvrage sur "Mansa Soundiata Kéita, le Législateur" devrait bientôt parraitre.
Pourquoi l’actuel président de l’assemblée nationale annonce t-il sa candidature par procuration ? Quel message veut-il porter d’ici 2020 et quelle est la position de Guillaume Soro devant le divorce entre le PDCI/RDA et le RDR alors que Henri Konan Bédié a entamé des discussions avec le FPI de Laurent Gbagbo ?
Autant de questions auxquelles Mamadou Djibo, que les internautes burkinabè ont découvert à l’occasion de la polémique qui a précédé l’insurrection populaire d’octobre 2014 au Burkina apporte des réponses avec une évidente sincérité militante.

L’Union des Soroïstes a annoncé la candidature de Guillaume Soro à l’élection présidentielle de 2020 lors de son premier conseil national qui s’est tenu le 8 août dernier. Pourquoi l’intéressé ne l’a t-il pas fait lui-même sachant que la candidature à ce poste est une décision personnelle ?

Je vous remercie pour cette opportunité que vous m’offrez de partager ma conviction ferme selon laquelle, le leadership du président Guillaume Soro est l’horizon d’attente des convergences citoyennes ivoiriennes pour la présidentielle de 2020.
Pour répondre à votre question, sémantiquement, annoncer n’est pas solliciter. L’Union des Soroïstes (UDS) a sollicité le leader Guillaume Soro Kigbafori, à tout le moins, sa bienveillante compréhension sur l’opportunité historique que les convergences citoyennes lui offrent de renouveler, conformément à sa vision d’une république égale, sociale, inclusive, laïque et démocratique, la promesse de la république. Le choix de sa personne comme leur candidat pour l’échéance électorale décisive de 2020 est le nom de cette attente populaire. En outre, à l’issue de son premier Conseil national, l’UDS a souverainement estimé que la riche et exceptionnelle expérience politique de Guillaume Soro Kigbafori, son sens élevé de l’Etat, magistralement administré lorsqu’il était le premier ministre dans des temps incertains, voire, critiques et surtout, ce don de soi dont il sait faire preuve, sont des gages pour la république de confiance.

Que voulez-vous dire exactement ?

Je considère que la république vit, précocement-c’est mon constat-, l’échéance présidentielle de 2020 comme le troisième moment émancipatoire de la Côte d’Ivoire. Je m’explique.
Après les luttes victorieuses pour l’indépendance intervevue en 1960 avec le Père fondateur de la Côte d’Ivoire moderne, le président Houphouët-Boigny a su mener une gouvernance vertueuse incarnée par la paix et la stabilité, la prospérité partagée et une prestigieuse diplomatie d’influence dans la sous-région ouest-afriacine.
Il a dû ensuite concéder la victoire, à son corps défendant, au multipartisme, des luttes dont la figure emblématique et le vainqueur incontestable reste le président Laurent Gbagbo, aidé par ses compagnons de la gauche démocratique, comme les professeurs Francis Wodié, Zadi Zahourou et Bamba Moriféré. Si vous ajoutez à ces quatre professeurs engagés pour la cause démocratique, les présidents Henri Konan Bédié, Robert Guéï et Alassane Ouattara et quelques autres personnalités, vous réalisez qu’il s’agit bien là, de la deuxième génération politique, celle qui assume le pouvoir d’Etat depuis 1993, peu importent les figures de prise de pouvoir. C’est le deuxième moment de la république dit multipartiste avec une génération dont les haines interpersonnelles, les rancunes tenaces, les détestations d’autrui ont généré des difficultés pour la marche radieuse de la Côte d’Ivoire, voire des violations massives des droits humains qui ont culminé avec la crise post-électorale de 2010-2011.
Les contradictions internes à cette technostructure restreinte du pouvoir exécutif se firent très rapidement vives. La république sombra alors dans les convulsions claniques, les dérisoires luttes pour la conservation du pouvoir d’Etat contre tel autre clan pourvoiriste, la mise en place de l’odieuse ivoirité et cette désinvolte tentative bédiéiste de "dehouphouëtisation" de l’Etat ivoirien, espérant un triomphe, dois-je dire. Mal lui en a pris, puisque le socle d’ouverture politique bienveillante héritée du président Houphouët-Boigny, ayant été ébranlé par l’affreuse ivoirité, le régime du président Henri Konan Bédié endura une sévère mise à sac par le coup d’Etat du Général Robert Guéï en décembre 1999.
Lorsque récemment, le président Alassane Ouattara s’est engagé avec l’accord de son aîné, le président Henri Konan Bédié, à « transférer le pouvoir à une nouvelle génération », il prend à témoin avec sagesse et pragmatisme, la fin de l’activité politicienne de cette grande génération d’hommes politiques en place depuis 1993.
L’échéance présidentielle de 2020 est donc un tournant décisif dans l’histoire politique ivoirienne dans la mesure même où elle consacre la relève générationnelle. Au nom de l’Etat de droit à rétablir, de l’inclusion de tous, de l’égalité citoyenne et du principe de fraternité, il est temps de s’engager dans une nouvelle voie pour se conformer à la patrie de la « vraie fraternité » que l’hymne national ivoirien proclame.

L’Union des Soroïstes en sollicitant et en déclarant par son chef incontesté, Marc Ouattara, que le leader Guillaume Soro est son candidat pour l’échéance décisive de 2020, tire la conclusion logique de cette lecture diachronique du contexte ivoirien. Pour l’Union des Soroïstes, le troisième moment ivoirien est celui de l’établissement de l’Etat de droit au service d’une république de confiance. Ce moment soroïste, je le nomme "l’Emancipation partagée". Sortir des servitudes et de l’arbitraire des puissants pour la pleine renaissance de la république avec Guillaume Soro Kigbafori. La lecture gaulliste stipule que le destin présidentiel est cette rencontre d’un homme avec le peuple. Il se trouve que, souvent, la même trame de fond historique détermine son acteur. C’est la lecture hégélienne. L’une comme l’autre, décrit le mouvement de convergences ou de perspectives nodales incarnées par une personnalité singulière. Il n’y a donc pas de contraposition destinale. L’Union des Soroïstes est objectivement la convergence des proches, des amis du président Guillaume Soro. Aristote disait que sans amis, personne ne choisirait de vivre. Il faut s’en féliciter, puisque, réciproquement, le président Guillaume Soro a, en partage cette amitié avec les Soroïstes. La déclaration de Marc Ouattara porte donc sur l’Emancipation partagée !

Guillaume Soro n’a fait aucun commentaire de l’annonce de sa candidature par ses partisans. Faut-il comprendre qu’il hésite et se donne ainsi la possibilité de ne pas y aller sans donner l’impression de se contredire ?

J’ai parlé d’Emancipation partagée. Elle a toujours une forme déclarative. Guillaume Soro n’a pas fait de commentaires de la sollicitation de ses partisans, mais il n’est assurément pas, dans les hésitations, pas plus qu’il tient en mains, la calculatrice des possibilités. Les épiciers et politiciens retors font ce boulot. La force du lien entre l’UDS et leur leader est telle que la sincérité interlocuttoire de ce dernier suffit pour sceller le destin de l’efficacité procédurale. Je n’y perçois aucune contradiction. Au contraire, je vois des raisons solides d’espérer, puisque le silence sied lorsque ce que l’on va énoncer est moins beau. L’aléthique est auréolé, parfois, de sa propre élégance. Et, dire est faire pour les Soroïstes. Dire est sincérité et le président Marc Ouattara, au nom de son mouvement vient de nous administrer cette preuve. Le président Guillaume Soro salue ses amis déterminés puisque lui-même est dans la détermination sereine, le regard fixé sur l’horizon d’attente de ses nombreux partisans tant ivoiriens qu’africains.

Quand compte t-il officialiser sa candidature ?

Lorsque le destin vous assigne une mission, s’émanciper des servitudes et de l’arbitraire au profit de l’établissement de l’Etat de droit pour votre patrie, incarner une inspiration solidaire pour l’Afrique du progrès social, convenez avec moi, qu’il ne vous revient pas d’officialiser une candidature. Porteur d’une espérance, l’on est d’office connecté à son avènement comme don de soi, homme de devoir et facilitateur de l’envol de l’espoir. Nous sommes dans la proximité de cette probabilité. Bergson disait en 1911 que la probabilité est dans le voisinage de la certitude.

Le président du PDCI a dépêché son représentant à la cérémonie au cours de laquelle, la candidature a été annoncée. Faut-il y voir une alliance Bédié-Soro contre le président Ouattara ? Sachant que Soro a été élu député sous les couleurs du RDR, ne prend t-il pas le risque d’être débarqué de son poste de président de l’Assemblée nationale ?

Le président Henri Konan Bédié est la boussole des militants et sympathisants du troisième plus vieux parti politique d’Afrique : le Parti démocratique de Côte d’Ivoire/Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA), crée en 1945 à Bamako, la fière capitale de l’Afrique de l’Ouest, à l’époque. De ce fait, il est le dépositaire de la mémoire légitime et gardien vigilant de l’héritage du président Houphouët-Boigny. Il a dépêché monsieur Bayilli, son représentant, au Conseil politique de l’Union des Soroïstes, un geste qui mérite d’être salué patrce qu’il met le président Bédié en résonnance avec les confluences du changement de 2020. Il a du flair, me direz-vous ; c’est vrai, il a beaucoup de métier. Mais n’oubliez pas que de façon constante, résolue et sincère, lorsqu’il présidait aux destinées de la Côte d’Ivoire à la fin des années 90, le président Bédié rencontrait déjà Guillaume Soro, alors jeune leader et syndicaliste tenace et figure emblématiques de la Fesci. Le Président Bédié dit à qui veut l’entendre, que Guillaume Soro Kigbafori est son « fils bien aimé ». Il ne s’agit point d’une alliance. Il y a là, je vous fais observer, dans la fidélité, le lien filial. Alassane Ouattara qui est président de la République, a une tendresse filiale pour Guillaume Soro. C’est un fait. Mais nous sommes des politiques de tradition française, depuis la glorieuse Révolution française de 1789.
Le président Ouattara, est, conformément à cette longue tradition de raffinement politique, de luttes de positionnement et de droits, au-dessus, des partis politiques. De la décence, il sied.
Quant au RDR, sa base sociologique est dans le mainstream soroïste. Je ne parle pas des apparatchiks. Il y a là, globalement, le constat des congruences dynamiques venant d’en bas autour de l’invariant politique Guillaume Soro Kigbafori. Il n’y a donc pas de distanciation politique qui puisse constituer un obstacle objectif préjudiciable au poste d’élu RDR de Ferkéssédougou, a fortiori, une menace consistante contre son poste de président de l’Assemblée Nationale. Quant aux rivalités de certaine nomenklatura intramuros des républicains, il ne faut pas s’en faire. La compétition est d’essence stimulante lorsqu’elle est loyale. Le leadership de Guillaume Soro, sa passion de la tolérance des opinions divergentes et sa constance patriotique pour l’approfondissement du processus démocratique et l’établissement de l’Etat de droit autorisent, salva veritate, ces rivalités. Parce qu’après tout, il faut laisser les opinions fausses se diffuser pour mieux les déconstruire avec l’évènement de la vérité.

Le PDCI a rompu son appartenance au Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) et a entamé des discussions avec le Front populaire ivoirien (FPI). Dans quel camp se trouvent les Soroïstes ?

Vous confirmez ainsi que l’échéance décisive de 2020 préfigure toutes les configurations de l’électorat et les anticipations de la société politique ivoirienne depuis la signature de l’ordonnance présidentielle accordant l’amnistie à des prisonniers politiques. Il faut au passage remercier le président Alassane Ouattara car pour nous Soroïstes, seule la concorde nationale par le pardon et la réconciliation assure le salut de la république. Les Soroïstes sont les seuls du champ politique ivoirien à disposer d’un leader avéré, testé, éprouvé et prêt à gouverner, au pied levé. Entre lui et les autres, il n’y a pas photo comme on dit à Treichville ! Symétriquement à ce fait majeur incontestable, nous sommes au seuil d’un momentum qui, dans le voisinage de l’échéance, établira les amis, les proches, les convergences citoyennes, le mouvement associatif comme le Mainstream. Les fleuves vont à la mer comme les humains affectionnent être du camp des vainqueurs. L’Union des Soroïstes est une formation politique ivoirienne quia a été lancée le 8 juillet 2017. A cette occasion, j’avais eu le privilège de prononcer la conférence inaugurale sur le "Nouveau vivre ensemble ivoirien". Cette année, le conseil politique s’est tenu à la Bourse du Travail, puisqu’en une seule année, nous sommes passés de 18 000 militants à près de 60 000. Il fallait un espace populaire qui rappelle la sueur, la dignité du travail et du travailleur, la discipline, l’ardeur au travail, dans un quartier légendaire. L’enfant du peuple retourne ainsi à sa base pour diriger tantôt des bases arrières, tantôt l’avant-garde, comme le centenaire et indomptable Madiba nous l’enseigne.

Propos recueillis par Joachim Vokouma
Kaceto.net