L’élection présidentielle de 2018 promettait d’être en rupture avec celle de 2011. La qualité des adversaires du candidat sortant, Paul Biya, l’exaspération du peuple camerounais, la crise sociopolitique dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, la montée en puissance des réseaux sociaux, l’imprévisible regard de la communauté internationale et, dans une certaine mesure, l’entrée en scène du Conseil constitutionnel constituaient autant de signes annonciateurs d’une compétition aussi âpre qu’ouverte.

Les augures n’ont pas été trahis. De la précampagne électorale à l’après-scrutin, en passant par la campagne électorale et le jour du vote, le mercure monte et monte encore dans le thermomètre politico-électoral, instillant l’ébullition dans la société camerounaise. Sur les plateformes virtuelles, les plateaux de radios et télévisions, les chaumières, etc., les débats autour de la présidentielle 2018 rappellent ceux autour des glorieuses épopées des Lions indomptables. C’est tout à l’honneur du peuple camerounais et des entrepreneurs politiques qui ont réussi à détricoter la désaffection des Camerounais, notamment des jeunes, pour la chose politique et à les convaincre qu’avec le bulletin de vote, ils sont et demeurent les seuls maîtres de leur destin.

Depuis lundi dernier, les débats achoppent sur la déclaration d’un des candidats à cette élection présidentielle. Maurice Kamto dit avoir marqué le penalty historique. Il entend ainsi défendre fermement ce « mandat clair » que lui a confié le peuple. Après cette sortie vivement critiquée, son parti, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc), a saisi le Conseil constitutionnel en vue de l’annulation partielle de la présidentielle du 7 octobre dans des circonscriptions électorales reparties sur sept régions. Cette stratégie du MRC invite à la prudence dans l’analyse. Nul ne peut en effet affirmer péremptoirement, en l’état actuel de la situation, si le candidat Maurice Kamto suivra jusqu’au bout la voie légale, s’il s’inscrira dans une logique anti-républicaine ou alors s’il fera le grand écart entre la loi électorale et l’aloi de l’insurrection.

Un autre candidat, en l’occurrence Cabral Libii, estime que sa victoire a
été « scandaleusement » volée et invite le peuple à « se tenir prêt ». Là également, on ne sait pas grand-chose sur la modalité additionnelle de réprobation des résultats qu’utilisera le candidat du parti Univers, qui a déposé un recours au Conseil constitutionnel pour l’annulation totale du scrutin du 7 octobre.

En revanche, on note une certaine tiédeur dans les réactions des chancelleries occidentales depuis le déroulement de ce scrutin ; en dépit de certains appels de pied. Les Etats-Unis se contentent, pour l’heure, d’inviter les candidats à rester dans le cadre légal au cas où ils ont des revendications à formuler. Silence radio du côté de la France. Peut-être Paris tient à éviter toute précipitation comme celle qui avait jeté le trouble dans les esprits après deux déclarations contradictoires du Quai d’Orsay en 2011, au lendemain de la présidentielle camerounaise.

Curiosité, en l’absence des observateurs de l’Union européenne et du Commonwealth, l’establishment a cru devoir « fabriquer » des agents de Transparency International pour valider cette élection. C’est dire si le feuilleton de cette présidentielle n’a pas épuisé ses épisodes.

Camer.be