Dans sa dernière enquête sur le tourisme gastronomique, l’Organisation Internationale du Tourisme (OMT) révèle que la gastronomie est la troisième raison des voyages dans le monde après la culture et la nature. Mais dans ce tourisme culinaire, l’organisation révèle que l’Afrique demeure quasi-inexistante. Quelques pays réussissent certes à tirer ça et là leur épingle du jeu, mais ce n’est rien comparé au formidable potentiel dont regorge tout le continent. Selon la Banque Mondiale, la cuisine a le pouvoir d’influer sur toute la chaîne de valeur l’agribusiness en Afrique.

Au-delà des infrastructures routières, hôtelières et des services à la personne censés séduire les touristes, mais qui demandent un investissement financier conséquent, l’Afrique, qui regorge déjà à la base d’une nature et de paysages avantageux pas souvent mis en valeur, bénéficie aussi d’une riche diversité culinaire qui ne demande qu’à se faire voir et goûter.
Comme son nom l’indique, le tourisme culinaire consiste à voyager vers une destination, attiré par la découverte de ses plats et mets. De nombreux ressortissants africains installés dans le monde tentent aujourd’hui d’être des ambassadeurs de la cuisine africaine à l’étranger à travers moults concepts de restaurants traditionnels et autres fast-food. Mais, ces efforts, même s’ils rencontrent quelques succès, demeurent tout de même limités. Ils ne témoignent pas suffisamment de toute la richesse que le continent a à offrir. L’Afrique, c’est 54 nations, souvent elles mêmes riches de diverses communautés dont la gamme culinaire est variée. L’Afrique, c’est des milliers de recettes de cuisine. En somme, une découverte gustative sans fin.
À défaut d’amener la cuisine africaine à l’étranger, méthode qui fait perdre une
plus-value au continent, il semble qu’il serait plus judicieux de faire de l’Afrique une destination culinaire de premier choix. Une stratégie qui serait bénéfique aussi bien pour le tourisme national que continental.

C’est du moins ce que pensent certains pays comme le Sénégal, le Maroc et quelques autres. Au Cameroun, profitant de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) de 2019, finalement déportée en Egypte, un groupe de restaurateur conduit par Jean Calvin Mebenga a nourri l’idée d’organiser le tout premier salon du tourisme gastronomique du pays du 7 au 17 juin 2019 à Yaoundé et du 20 au 30 juin 2019 à Douala. Avec la CAN, l’idée était de séduire les passionnées du football et leur donner une raison supplémentaire de revenir dans le pays. Bien avant eux, le 19 conseil national du tourisme, présidée par le Premier ministre Philémon Yang, s’était déjà appesanti le 04 décembre 2018 sur les actions à mettre en oeuvre pour optimiser le potentiel du tourisme gastronomique dans le pays. Au Maroc, la cuisine a commencé à être mise en avant pour promouvoir le pays comme destination touristique en 2017, lors du lancement de la première édition du Festival de la diplomatie culinaire.
Lors de la seconde édition qui s’est tenue du 08 au 11 février 2018 à Maspalomas, aux îles Canaries, sous le thème « L’art culinaire marocain : histoire de mille et une
saveurs », Bachir Ayad, le président du Festival, a déclaré que ce second tour était organisé parce que lors du premier, « on a bien compris que la gastronomie peut façonner positivement l’image d’un pays, d’une région ou d’une ville ». Le Sénégal, lui, il s’y est pris plus tôt que les autres dans la promotion de sa cuisine comme atout touristique. En 2013, sous l’initiative du chef cuisinier Pierre Thiam, AFROEATS, le Festival international des produits locaux et de la cuisine africaine a vu le jour. Il s’est tenu du 30 avril au 05 mai 2013 à Dakar. Mais l’idée n’a pas fait long feu.
Au-delà du dynamisme dans l’industrie touristique, la Banque Mondiale estime que a cuisine a également le pouvoir d’influer sur toute la chaîne de valeur du secteur de l’alimentaire et développer l’agribusiness en Afrique.
Qui dit forte présence touristique attirée par la cuisine locale dit forte demande en produits locaux de qualité. Le tourisme culinaire en Afrique, s’il est bien encadré, a le pouvoir de contribuer au développement de l’agribusiness sur le continent, lui permettant d’aller bien au-delà du trillion de dollars US de revenus que la Banque Mondiale estime qu’il générera d’ici 2030.

En effet, la forte demande alimentaire des touristes, associée à celle locale, influera sur la production agricole à travers laquelle les agriculteurs pourront dégager de belles marges financières. Cette forte demande de produits de la part des restaurateurs, qu’il faudra satisfaire, suscitera également une forte demande en main-d’œuvre. De nouveaux emplois seront ainsi crées au niveau des exploitations agricoles. En 2012, lors de la conférence internationale sur la gastronomie, la culture et le tourisme, organisé du 06 au 07 septembre à Bakou en Azerbaijan, le secrétaire général de l’OMT, Taleb Rifai, soulignait déjà que « le tourisme gastronomique est un important vecteur de développement, produit à partir des ressources locales de sorte que l’argent des touristes est réinvesti localement, permettant aux autres commerce de se développer ».
L’Afrique demeure encore le continent le moins visité du monde selon l’OMT. Dans son rapport 2017, l’organisation indiquait que seuls 37 milliards de dollars US ont été générés par 63 millions de touristes internationaux sur le continent en 2017. Au niveau mondial, c’est 1,326 milliard de voyageurs qui ont été enregistrés pour un revenu global de 1340 milliards de dollars US.

Agence Ecofin