En 2020, le franc CFA aura 75 ans. La monnaie, utilisée dans deux régions africaines1, est garantie par le Trésor français et arrimée à l’euro. Bien que la baisse des prix des matières premières en 2014 ait révélé des vulnérabilités, la situation n’est pas comparable à celle de 1994, lorsque le franc CFA avait été dévalué de 50% dans les zones occidentales (UEMOA) et centrale (CEMAC). Cependant, les divergences entre les membres impliquent un optimisme prudent quant à la stabilité de cette monnaie.

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En examinant l’intégration commerciale entre les Etats membres, la mobilité de la main-d’œuvre, le risque de surévaluation du Franc CFA, la viabilité de la dette et les réserves de change de la zone (critère de la zone monétaire optimale), nous constatons que :

La zone CEMAC est sous pression. Notre modèle montre que le commerce intra-zone est inférieur de 200 millions USD à ce qu’il pourrait être étant donné les frontières, langues et monnaies communes. On constate des signes de surévaluation de la monnaie dans la région (principalement en RCA, au Gabon et en République du Congo) en raison de la baisse des prix du pétrole. Cela a conduit à une augmentation de la dette publique et à une baisse du ratio des réserves de change M2 au-dessous du seuil de 20% en République du Congo et au Tchad. Malgré ces fragilités, une rupture ou une dévaluation dans les cinq prochaines années est peu probable. Si les prix du pétrole devaient chuter pendant longtemps à 30 dollars américains / baril, la région ne pourrait éviter une dévaluation, mais une dissolution resterait improbable. L’adhésion au Franc CFA est une solution institutionnelle qui garantit la stabilité des prix à ses membres. Toute sortie serait plus un choix politique qu’économique.

La zone UEMOA est sous contrôle. La dette publique a augmenté mais reste gérable, la parité du franc CFA ne semble pas surévaluée et le niveau des réserves est suffisant. Cependant, les pays membres ne tirent pas le meilleur parti de cette union monétaire, car les flux commerciaux intra-zone sont inférieurs à ce qu’une union monétaire devrait engendrer dans cinq pays sur huit. L’accord commercial de la CEDEAO et le projet de devise ECO avec des pays anglophones voisins, tels que le Ghana et le Nigeria, changent la donne. Pourtant, le franc CFA pourrait bien célébrer son 100e anniversaire avant que l’ECO ne le remplace.

(1) Franc CFA occidental : (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal, Togo). Franc CFA d’Afrique centrale : (Cameroun, RCA, Tchad, République du Congo, Guinée équatoriale, Gabon)

Stéphane Colliac : Economiste Senior en charge de l’Afrique et de la France chez Euler Hermes
Chris-Emmanuel Blé : Assistant de Recherche Economique chez Euler Hermes