Solidaire des autres syndicats qui s’opposent à l’application de l’Impôt unique sur le traitement des salaires (IUTS) décidée par le gouvernement et qui devrait être effective dès la fin de ce mois, l’Intersyndicale des magistrats invite le gouvernement à revoir sa copie afin d’éviter " la précarisation de la condition du travailleur burkinabè"

Déclaration de l’intersyndicale des magistrats du Burkina Faso

Les syndicats de magistrats suivent avec attention les débats autour de la question de l’Impôt Unique sur les Traitements et Salaires (IUTS) qui a été institué par l’ordonnance N° 70-043/PRES/MFC du 17 septembre 1970.

Sans s’opposer au principe de l’IUTS, les syndicats de magistrats observent en premier lieu que jusqu’à l’intervention de la loi n°058-2017/AN du 20 décembre 2017 portant Code général des impôts modifiée par la loi n°051-2019/AN du 05 décembre 2019 portant loi de finances pour l’exécution du budget de l’Etat, exercice 2020, les indemnités des agents publics de l’État étaient hors de l’assiette dudit impôt. Toutes les négociations et luttes des agents publics portant sur les différents éléments de leurs traitements servis actuellement, ont été menées dans ce contexte. Il ne venait à l’esprit de personne, que par des prétextes autoritaires, l’IUTS dont le contexte de la création est connu pour être le fruit d’un consensus démocratiquement obtenu, serait étendu aux indemnités des travailleurs.

Ils observent en second lieu que l’IUTS, dans la formule dont l’application est projetée, ne tient pas compte de l’esprit de la loi 004-2015/CNT du 03 mars 2015 portant prévention et répression de la corruption au Burkina Faso qui pose le principe de la nécessité d’une rémunération adéquate des travailleurs, donc y compris après la déduction des impôts.

Ils observent en troisième lieu que le climat social est sérieusement mis à rude épreuve dans le contexte actuel de l’application des nouvelles mesures fiscales relatives à l’IUTS, les travailleurs dans leur ensemble, subissant déjà le poids difficilement supportable d’autres impôts et de la cherté de la vie, surtout aussi que Son Excellence Monsieur le Président du Faso a demandé avec insistance une trêve sociale.

Au bénéfice de ces observations, les syndicats de magistrats, tout en réaffirmant leur solidarité avec les autres syndicats qui ont dénoncé l’extension de l’IUTS aux indemnités, interpellent le Gouvernement sur les risques d’une plus grande détérioration du climat social si des dispositions ne sont pas prises pour éviter des situations regrettables dans la gestion de cette question.

Les syndicats de magistrats notent que pour certains membres du gouvernement, le droit à des conditions salariales décentes ne semble pouvoir jouer que pour eux et uniquement pour eux. Pour y parvenir, certains n’hésitent pas du reste, pour la fixation de leur salaire et tout en regrettant paradoxalement le poids de la masse salariale des agents publics qu’ils cherchent à mettre en conflit avec le reste de la population, à violer de façon flagrante le décret 2008-891/PRES/PM/MEF du 31 décembre 2008 portant rémunération du Premier Ministre, des Présidents d’institutions et des Membres du Gouvernement pour se faire octroyer des salaires largement plus élevés que ce à quoi ils ont légalement droit. C’est pour éviter de telles situations que les syndicats de magistrats ont formellement dénoncé ce jour même au Procureur du Faso près le Tribunal de Grande de Ouagadougou la fixation estimée délictueuse du salaire d’un des Ministres afin que les renseignements puissent être recueillis et le dossier transmis à l’Assemblée Nationale comme voulu par la loi en pareille circonstance.

Pour terminer, l’intersyndicale invite les magistrats à la mobilisation générale et à l’extrême vigilance afin d’éviter que PIUTS, dans son application, ne devienne finalement une porte ouverte à la précarisation de la condition du travailleur burkinabè.

Fait à Ouagadougou le 15 janvier 2020