L’Alliance des partis de la majorité présidentielle (APMP) est sortie de son silence pour exprimer sa position sur la grogne sociale provoquée par l’application de l’IUTS sur les primes et indemnités des salariés du secteur public.
Tout en apportant son soutien au président du Faso et au gouvernement, l’APMP en appelle au dialogue et au sens des responsabilités.

« Peuple du Burkina Faso,

Depuis l’accession à la magistrature suprême de Son Excellence Roch Marc Christian KABORE, le dialogue avec les partenaires sociaux constitue la cheville ouvrière de l’apaisement du climat social pour la mise en œuvre réussie du programme pour lequel la majorité des Burkinabé lui a accordé sa confiance. C’est ainsi que dans le cadre de la recherche d’une justice sociale et d’une équité dans le traitement de tous les Burkinabé, le gouvernement depuis 2016, est en concertation avec les organisations syndicales et corporatistes sur plusieurs points dont les revendications salariales sectorielles, la remise à plat des rémunérations des agents du secteur public et la question relative à l’application de l’Impôt Unique sur les Traitements et Salaires (IUTS) sur les primes et indemnités des agents publics de l’Etat.

Malgré le contexte socioéconomique et financier difficile, le gouvernement a répondu favorablement à plusieurs revendications des organisations syndicales et corporatistes parmi lesquelles :

la liquidation et le paiement des incidences financières de la loi 081 relative à la fonction publique adoptée et votée en 2015 ;
la revalorisation de la rémunération des personnels de la justice, des personnels de l’éducation, des personnels des forces de défense et de sécurité, etc. ;
l’octroi de primes de motivation et de rendement pour certaines catégories d’agents publics ;
l’octroi d’indemnités de plusieurs natures, etc.
Mais force est de constater que depuis le début de cette année 2020 et plus précisément depuis le conseil des ministres du 19 février 2020 où le décret consacrant l’élargissement effectif de l’IUTS sur les primes et indemnités des agents de la fonction publique a été pris et son application pour fin février 2020, une tension sociopolitique est perceptible sur l’échiquier politique national, susceptible de mettre à mal la bonne marche de l’administration publique et de compromettre davantage la paix et la cohésion sociale.

L’Alliance des Partis et formations politiques de la Majorité Présidentielle (APMP), constate avec beaucoup de regret et de désolation, que le dialogue entre le gouvernement et les organisations syndicales semble être rompu sur les multiples questions dont l’application de l’IUTS et semble se déporter dans les rues des différentes villes du pays par des perturbations dans la livraison de services publics aux populations et d’autres manifestations suscitées par des organisations syndicales.

Face à cette situation, et afin de permettre une meilleure compréhension des choses par les travailleurs du secteur public, l’APMP voudrait apporter son analyse sur trois aspects de la question de l’IUTS : l’historique de l’institution de l’IUTS en Haute Volta, aujourd’hui Burkina Faso, l’équité fiscale et le devoir patriotique.

De l’historique de l’institution de l’IUTS en Haute Volta, aujourd’hui Burkina Faso :
Suite au soulèvement populaire des Voltaïques du 03 janvier 1966 qui a donné suite à un pouvoir qui devrait faire face à une crise financière très aiguë et un bouillonnement social permanent, seul un sursaut patriotique national du peuple dans son ensemble, devait en être l’ultime solution.

C’est fort de cela que le Général Marc Garango a été appelé au ministère des finances, d’où il trouva « la potion magique » parmi plusieurs réformes notamment l’institution de l’IUTS en 1970.

Les braves travailleurs du public comme du privé acceptèrent alors de consentir à ce sacrifice en payant cet impôt sur leur salaire de base pour sauver la Nation. Cet impôt sera par la suite étendu aux primes et indemnités des travailleurs dans le secteur privé en 1978.

Aussi, l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, la résistance héroïque à la tentative de coup d’Etat de septembre 2015 ont fini de prouver une fois de plus la vaillance du peuple Burkinabè et son sens du devoir face aux grandes décisions de l’histoire. C’est pourquoi, la fronde sociale qui s’est installée immédiatement après l’accession au pouvoir du Président Roch Marc Christian Kabore, a été perçue comme l’expression d’une injustice sociale et un besoin de rétablir l’équité entre les filles et fils du pays, de combattre les inégalités en procédant à une juste répartition des fruits de la croissance. Toute chose qui justifie que malgré l’état peu reluisant de la situation économique nationale trouvée à sa prise de fonction, il a tenu à respecter les engagements pris par ses prédécesseurs vis-à-vis des partenaires sociaux et a œuvré au travers des différentes négociations syndicales à relever les traitements salariaux pour la quasi-totalité des fonctionnaires de façon substantielle.

Cependant l’arbre ne doit pas cacher la forêt. La menace terroriste, à laquelle le pays fait face depuis le 15 janvier 2016, avec pour risque l’occupation de son territoire et la désarticulation de son administration, a contribué à creuser et augmenter davantage les charges de l’Etat. Cela appelle plus que jamais à un sursaut patriotique national d’où l’appel du Chef de l’Etat à l’engagement citoyen par le volontariat, avec pour corollaire des efforts de guerre de toute nature et de toutes parts.

Compte tenu de tout ce qui précède et dans le souci de l’égalité de tous les Burkinabé, consacrée par notre loi fondamentale dans son article 1er : « Tous les Burkinabé naissent libres et égaux en droits… Les discriminations de toutes sortes, notamment celles fondées sur la race, l’ethnie, la région, la couleur, le sexe, la langue, la religion, la caste, les opinions politiques, la fortune et la naissance, sont prohibées », et de pouvoir disposer de ressources conséquentes pour faire face aux multiples défis et menaces qui se présentent, le gouvernement a initié plusieurs réformes et a entrepris également des échanges avec les partenaires sociaux pour l’élargissement de l’IUTS aux primes et indemnités des fonctionnaires, comme il en est au privé, tout en proposant des mécanismes de progressivité et de souplesse.

Malgré tout cela, il en souviendra au peuple que certains syndicats en 2019 quitteront même la table de négociation conduite par le Premier Ministre.

Cela explique à souhait l’appel à la va-t’en guerre de ces syndicats après l’application de cet élargissement de l’IUTS en fin février 2020.

Si l’APMP convient avec un des leaders syndicaux que « que seuls les fils maudits ne peuvent conserver les acquis des pères », elle constate paradoxalement l’attitude des mêmes leaders et de certains fonctionnaires qui, en refusant le moindre sacrifice, se réfugient dans un égoïsme destructeur et aux antipodes des valeurs de bravoure de nos ancêtres pendant que la Nation subit de graves menaces, avec une crise humanitaire accrue par le mouvement des populations.

De la question de l’équité fiscale dans l’application de l’IUTS sur les primes et indemnités des agents publics de l’Etat :
Comme décrit ci-dessus, le secteur privé s’acquittait de cet impôt depuis 1978, ce qui lui permet d’apporter de nos jours une contribution globale au titre de l’IUTS de plus de 78 milliards au budget de l’Etat (année 2018) contre environ 23 milliards pour le secteur public. Il est donc incongru d’imaginer que des bénéficiaires des efforts d’autres contribuables burkinabé, opposent un refus catégorique à la contribution de l’effort de sortie de crise de la Nation et appellent même à la suppression de cette contribution au niveau du secteur privé qui est déjà salvatrice pour le pays.

Mais que dire de l’impact direct de cette nouvelle ponction sur les fonctionnaires ?

Il nous revient qu’environ 94% des fonctionnaires verraient leur impôt augmenter de 0F à 10 000FCFA et seulement 6% connaîtront une hausse de leurs impôts de 10 001F à 50 000FCFA, du fait de la progressivité et de l’assouplissement voulus par le Chef de l’Etat, alors même que le niveau actuel des primes et indemnités atteint pour certaines catégories 600 000FCFA par mois.

Pour ce faire, chaque agent public contribue à la hauteur du niveau de ses primes et indemnités. Ainsi, plus les primes et indemnités sont élevées, plus est élevé le montant prélevé sans pour autant dépasser 50 000FCFA.

En outre, l’élargissement de l’IUTS aux primes et indemnités des agents de la fonction publique de l’Etat vient ainsi corriger une injustice entre travailleurs du public et du privé et ce, conformément à l’article 1 de notre loi fondamentale.

L’APMP voudrait aussi rappeler à souhait que cette nouvelle disposition a été consacrée par une loi votée à l’Assemblée nationale sans opposition. S’acquitter de cet impôt relève donc du strict respect de notre constitution qui stipule en son article 17 que : « le devoir de s’acquitter de ses obligations fiscales conformément à la loi, s’impose à chacun ».

Du devoir patriotique dans l’application de l’IUTS dans ce contexte de contribution aux crises sécuritaire et humanitaire :
L’application de cet impôt sonne comme un appel au patriotisme pour venir au secours de la Nation. Aussi, au regard de l’impact direct sur notre économie et pendant que certains s’enrôlent au prix de leur vie pour défendre la Nation sur le théâtre des opérations, les autres ont le devoir d’apporter de leurs ressources pour accompagner cet élan.

Peuple du Burkina Faso,

Face à cette situation, l’APMP, soucieuse d’un climat social apaisé et d’un environnement de travail propice aux actions de développement, en appelle au devoir de patriotisme de chacun pour répondre à l’appel de la Patrie.

A tous les agents publics de l’Etat, l’APMP, en appelle à la retenue et à un dialogue constructif exempt de préalable assourdissant afin de préserver la paix et la cohésion nationale. Elle les appelle par conséquent à abandonner toutes formes de manifestations préjudiciables, en particulier les débrayages sauvages et autres mouvements d’humeur non conformes à la légalité et qui sont de nature à perturber ou à paralyser les services publics à un moment où la nation toute entière porte un regard anxieux sur le front sécuritaire.

A l’endroit du Gouvernement, l’APMP l’encourage inlassablement :

– à poursuivre sa politique de concertation et de dialogue avec les partenaires sociaux et l’exhorte davantage à une meilleure communication en matière de redevabilité vis-à-vis du Peuple ;

– à continuer ses réformes tendant à une plus grande maîtrise des charges de l’Etat et à accentuer la lutte contre l’impunité et la corruption tant au niveau central que déconcentré ;

– à renforcer ses efforts d’accompagnement de nos Forces de Défenses et de Sécurité (FDS), et dans l’assistance aux multiples déplacés du fait des attaques terroristes de tous genres.

L’APMP, tout en réaffirmant son soutien au Président du Faso et à son gouvernement, appelle l’ensemble des Burkinabé à s’inscrire dans la dynamique de l’apaisement du climat sociopolitique et d’une trêve sociale, gage de stabilité et de développement économique et social, pour le grand bonheur des populations burkinabé.

Vive le Peuple Burkinabé et que Dieu bénisse le Burkina Faso !

Ouagadougou, le 03 mars 2020

Pour l’APMP,
Le Coordonnateur
Clément P. SAWADOGO