Message de Kadré Désiré Ouédraogo à l’occasion de la célébration de la journée internationale des droits de la femme le 8 mars.

Femmes du Burkina Faso, mes chères compatriotes !

Le 8 mars de chaque année la communauté internationale célèbre la journée internationale de la femme. Journée privilégiée d’action en faveur de la promotion et de la défense des droits et de l’épanouissement de la femme, elle mobilise à l’échelle mondiale, tous les pays autour de thèmes et de projets spécifiques en fonction de leurs préoccupations fondamentales du moment.
Au Burkina Faso, en 2020, cette célébration, 163ème du genre, se fait dans un contexte particulièrement dramatique au regard de la crise sécuritaire que connait le pays avec son cortège de tueries attribuées à des groupes armés non identifiés et à des milices civiles, de populations déplacées obligées d’abandonner tous leurs biens et de fuir leurs champs et leurs villages ; et une crise humanitaire sévère. Elle se tient aussi dans un contexte marqué par une fronde sociale très aigue qui menace la paix sociale et annonce de grands mouvements sociaux dont les conséquences peuvent être désastreuses.
Le contexte national de 2020, c’est aussi cette échéance électorale présidentielle et législatives de novembre prochain porteuse de germes de tensions dont nul ne peut prévoir ni l’issue ni les conséquences. Il faut le dire, objectivement, le Burkina Faso de 2020, sous la gouvernance actuelle est au fond du gouffre.

Chers compatriotes !

Dans un tel contexte, tout naturellement, les couches sociales vulnérables que sont les femmes, les enfants et les personnes âgées sont les premières victimes. Les femmes, nos braves mères, sœurs, filles et épouses beaucoup plus que tous les autres, puisque dans les situations extrêmes et de guerre ce sont sur leurs frêles épaules qui ploient déjà sous le poids de l’injustice sociale liée à des tares sociétales innées, que repose la survie de la famille.
Ce tableau pour le moins sinistre, pose directement et de manière pressante la question même de l’existence de notre cher pays, le Burkina Faso, alors que monte de partout des appels à une prise de conscience urgente et à prendre les mesures fortes à même d’inverser la tendance tant la gouvernance actuelle peine à imaginer et à trouver les solutions pour faire face.
En choisissant de placer la célébration de la journée internationale de la femme sous le thème : « crise sécuritaire au Burkina Faso : quelles stratégies pour une meilleure résilience des femmes » le pouvoir va assurément dans la bonne direction même s’il apparaît qu’il ne va pas jusqu’au bout des préoccupations.
En effet, si les conséquences directes et indirectes de l’insécurité sont en tête des causes des difficultés des femmes dans le Burkina Faso d’aujourd’hui, force est de reconnaître que la gouvernance actuelle pose par elle-même de très sérieux problèmes qui aggravent la condition de la femme. Ainsi, si on peut comprendre nos difficultés à faire face efficacement à la guerre asymétrique qui nous est imposée, rien par contre ne peut justifier le chaos et la débâcle dans la gestion des conséquences sociales de cette guerre, notamment la mauvaise prise en charge des victimes que sont les femmes et les enfants.
Le constat de l’incapacité du pouvoir à faire face, voire de son manque de volonté à prendre les mesures fortes qui s’imposent, sont une réalité affligeante qui induit soit de l’insouciance, soit du fatalisme, à moins que ce ne soit les deux à la fois, ce qui conduit au même résultat, un désastre humanitaire sans nom. Sinon comment expliquer autrement qu’il n’y ait aucune mesure préventive pour faciliter l’accueil et la prise en charge des déplacés, obligeant ceux-ci à s’entasser dans la promiscuité et à accroître de manière exponentielle le nombre de mendiants dans nos centres urbains ; comment expliquer l’ignorance totale de la prise en charge des enfants déscolarisés des zones de conflits ; comment expliquer l’incapacité des pouvoirs publics à garantir aux femmes les mesures sociales prises pour alléger leurs fardeaux ; comment expliquer autrement la crise alimentaire aiguë qui sévit dans les camps de déplacés ; comment expliquer le manque d’eau etc. ; comment expliquer l’inorganisation qui entraîne l’inefficacité des dons et autres secours internationaux et d’autres bonnes volontés ; autant de questions qui interpellent.
On se cache derrière les massacres quotidiens de nos braves FDS, dont nous saluons au passage le sacrifice pour sauver notre nation et les populations civiles, victimes innocentes, pour occulter le drame de ces centaines de milliers de femmes et d’enfants abandonnés à eux-mêmes dans une précarité inacceptable. Victimes, hier de la violence et du terrorisme, elles sont aujourd’hui victimes de l’incompétence et de l’insouciance d’un pouvoir qui se comporte comme un monstre froid qui n’a d’yeux ni d’oreilles que pour lui-même et sa survie.

Femmes du Burkina Faso !

Pour nous, le combat pour la restauration de l’autorité de l’Etat et de l’intégrité du territoire va de pair avec celui de la restauration de la dignité humaine des populations victimes directes de ces massacres. Ce faisant, la réflexion ne devrait donc pas porter uniquement sur la résilience héroïque des populations, particulièrement des femmes, mais sur la démission de l’Etat face à ses devoirs régaliens de protection des populations et sur comment l’obliger à s’assumer pleinement ! Assurément c’est trop demander au pouvoir en place qui cultive une omerta sur cette triste réalité qui est une autre forme de la rupture du contrat social qui sous-tend notre vivre ensemble.
Il s’agit bien de cela car si le pouvoir et avec lui l’Etat continuent de fuir devant leurs responsabilités c’est le pays tout entier qui va être mis sous coupes réglées par les bandes terroristes et les criminels en tous genres.

Femmes du Burkina Faso !

En livrant notre message à l’occasion de ce 8 mars 2020, ici à Dori ; nous voulons vous dire toute notre fierté et vous féliciter pour votre farouche détermination à faire face et à supporter avec dignité le lourd fardeau de la famille mise à rude épreuve par le terrorisme et les conflits intercommunautaires. Nous partageons avec vous les douleurs incommensurables des pertes en vies humaines occasionnées par la barbarie des terroristes. Nous compatissons avec vous et vous assurons de notre solidarité de tous les instants. Nous vous assurons de notre engagement à agir avec vous pour la transformation qualitative de vos conditions de vies. Nous vous assurons que ni l’hydre terroriste, ni les massacres intercommunautaires, ni la gestion scabreuse de la situation des déplacés ne sont des fatalités. Oui on peut faire face victorieusement et nous nous y engageons s’il nous est donné de le faire ! L’avenir nous donne l’occasion de faire autrement et nous vous y encourageons fortement.
Vive la journée du 8 mars !
Vive les femmes du Burkina Faso !

Kadré Désiré OUEDRAOGO
Candidat à l’élection présidentielle