L’Union des chauffeurs routiers du Burkina (UCRB) annonçait une grève du 22 au 26 février 2021 pour dit-elle, dénoncer l’ingérence du ministre des Transports et le non-respect de l’arrêté portant gestion et contrôle du fret en provenance et à destination du Burkina Faso. A l’issue d’un point de presse le samedi 20 février 2021, la même UCRB a annoncé que la grève était suspendue pour un mois, le temps de poursuivre les négociations pour une sortie de crise. Une suspension qui n’est cependant pas sans conséquences pour le consommateur. Explications.

Pour les premiers responsables de l’Union, la suspension vise à soulager la population déjà affectée par la crise sécuritaire et sanitaire. Le motif est convainquant quand on connait l’importance du secteur des transports dans l’activité économique et les peines subies par les populations (dont une grande partie vit au jour le jour) en cas de grève des transporteurs. La suspension annule-t-elle cependant l’effet sur la population ?

On peut distinguer deux effets : le premier qui est lié au simple fait d’annoncer la grève et le second qui est lié au fait que la grève est effectivement observée. Il est plus évident que la suspension soulage du dernier effet mais pas du premier. En effet, le simple fait d’annoncer la grève, amène un individu rationnel à modifier son comportement pour se préparer en conséquence. Les produits vont se faire rares sur le marché et certainement leurs prix vont augmenter. Les revendeurs font plus de stocks pour qu’ils ne s’épuisent pas et pour pouvoir revendre plus cher au moment de la pénurie liée à l’arrêt des camions. Les consommateurs cherchent également à faire des stocks pour ne pas manquer de produits et pour éviter de payer plus cher plus tard les mêmes produits. Cette course pour faire des stocks déclenche d’elle-même une augmentation des prix. Les prix augmentent à cause des anticipations alors que les camions ne sont mêmes pas encore à l’arrêt. Pour des populations fragilisées par la crise économique, sécuritaire et sanitaire, comme le précise l’UCRB, cela n’est pas à négliger. Plusieurs personnes ont certainement de manière rationnelle, fait le plein de carburant à l’approche de la date de la grève. Sans carburant, pas de déplacement, pas de travail, pas de revenu et pour certaines personnes, pas de repas.
Avec cette logique, l’annonce de la grève amène à faire du carburant une certaine priorité qu’elle ne devrait l’être et cela au détriment d’autres dépenses non moins importantes. En définitive, la population subit d’une manière ou d’une autre l’effet de la grève, même simplement annoncée.

Florent Maré
Doctorant en Economie
Université Thomas Sankara
Kaceto.net