La Cour de Justice de la Cédéao (CJC) a rendu, ce jeudi 7 décembre 2023, le délibéré sur les mesures provisoires dans l’affaire concernant l’Etat du Niger et sept (7) autres contre la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement et deux (2) autres dont l’audience s’est tenue le 21 novembre à son siège à Abuja, au Nigeria.

Dans la décision qu’elle a rendue, la Cour a estimé que les militaires qui ont pris le pouvoir au Niger n’ont aucune qualité pour représenter l’Etat du Niger et donc saisir la juridiction communautaire. Les sages de la Cour ont, en conséquence, déclaré « irrecevables », les requêtes principales et secondaires introduites par les avocats de l’Etat du Niger et 7 autres plaignants et portant sur la légalité des sanctions économiques et financières prises par la Conférence des Chefs d’Etat de l’organisation communautaire lors de leur sommet extraordinaire du 30 juillet 2023 sur la situation politique du Niger suite au coup d’Etat du 26 juillet. Une décision qui intervient à la veille d’un nouveau sommet des dirigeants ouest-africains qui va également se pencher sur la question avec comme principal enjeu, la levée ou non des sanctions qui affectent durement les populations nigériennes depuis maintenant plus de trois (03) mois.

Dans leur décision, les sages de la Cour communautaire ont estimé que « les militaires qui ont pris le pouvoir au Niger par la force, n’ont pas qualité pour représenter l’Etat du Niger, et donc n’ont aucune qualité pour saisir la cour de justice de la CEDEAO ». C’est du reste la principale ligne de défense des avocats de la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement et deux (2) autres dans le procès qui les oppose à l’Etat du Niger et sept (7) autres sur la légalité des sanctions prises par les dirigeants ouest-africains contre le Niger suite au coup d’état du 26 juillet dernier.

Ainsi donc, la Cour de Justice de la Cédéao a suivi la défense des avocats de la Conférence des chefs d’Etat et a débouté les plaignants à savoir l’Etat du Niger ainsi que la consultante Docteur Moussa Fatimata, la Société Nigérienne d’Electricité (NIGELEC), la Chambre de Commerce et d’Industrie du Niger (CCIN), le Conseil Nigérien des Utilisateurs des Transports Publics (CNUT), le Conseil National de l’Ordre des Pharmaciens du Niger, le Réseau des Chambres d’Agriculture du Niger (RECA) et le Syndicat des Commerçants Importateurs du Niger (SCIN).

Pour rappel, après l’audience d’audition des deux parties qui s’est tenue le 21 novembre à son siège à Abuja, la Cour a fixé le délibéré pour ce 07 décembre 2023.

A l’audience, les requérants représentés par Me Mounkaila Yayé et cinq (5) autres avocats ont plaidé que les sanctions imposées par la Conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement entrainent des conséquences néfastes pour le peuple nigérien qui manque de nourriture, de médicaments et d’électricité en raison de la fermeture des frontières et la Coupure par le Nigeria de la fourniture en électricité. Ils ont demandé à la Cour de prendre des mesures provisoires en ordonnant à la conférence des Chefs d’Etat et de Gouvernement la levée immédiate desdites sanctions.

Ils ont noté que les défendeurs ont exagéré dans la prise des sanctions parce qu’elles n’ont pas été graduelles et que le Niger a été traité de manière inégale et injuste par rapport aux trois autres Etats membres dans lesquels une junte a pris le pouvoir de manière anticonstitutionnelle. Il s’agit du Mali, du Burkina Faso et de la Guinée. Les requérants ont également demandé à la Cour de retenir « prima facie » sa compétence pour connaitre de l’affaire ainsi que de déclarer la requête recevable conformément aux textes de la Cour.

Les défendeurs à savoir : la Conférence des chefs d’Etat, le Conseil de médiation et de sécurité et la Commission de la CEDEAO représentés par Me François Kanga-Penond, ont soulevé une exception d’irrecevabilité de la requête demandant à la Cour de rejeter la demande des requérants. Me Kanga-Penond a expliqué que le coup d’état n’est pas reconnu dans une démocratie et que la junte n’a pas qualité pour engager une action devant la Cour parce que le Président démocratiquement élu a une action en instance devant la Cour par laquelle il conteste la légitimité de cette même junte. Il en déduit que ce défaut de qualité à agir empêche la juridiction communautaire d’examiner cette demande de mesures provisoires.

Dans la requête introductive, les requérants, l’Etat du Niger, six organismes nigériens et une ressortissante nigérienne demandent aussi à la Cour de constater l’illégalité entachant les mesures prises par la Conférence des Chefs d’état et de Gouvernement de la CEDEAO lors de ses sessions extraordinaires des 30 juillet et 10 août 2023 et visant à rétablir l’ordre constitutionnel en République du Niger. Ils prient la Cour d’annuler toutes les décisions de ces organes de la CEDEAO portant sanctions, y compris la décision de recourir à l’intervention armée contre la République du Niger.

Il faut noter qu’avant cette décision de la CJC, les plaignants ont été également déboutés sur la même affaire, en référé, au niveau de la Cour de justice de l’UEMOA, siégeant à Ouagadougou. Cette décision de la Cour communautaire de justice intervient à la veille d’un nouveau sommet des Chefs d’Etat de la Cédéao, le weekend prochain à Abuja, et qui vont devoir se prononcer sur le maintien ou non de ces sanctions économiques et financières qui affectent durement les populations nigériennes depuis bientôt plus de quatre mois. Le 14 décembre prochain, la Cour aura également à rendre verdict sur l’affaire opposant cette fois l’ancien président Bazoum Mohamed et l’Etat du Niger sur « la violation des ses droits » notamment sa détention ainsi que celle de son épouse et de son fils, qualifiées d’arbitraires par leurs avocats.

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